50% des déchets ne font pas bon ménage
La population des 17 communes du territoire produit 7500 tonnes d’ordures ménagères résiduelles par an, hors tri sélectif. Elles sont ramassées dans les bacs roulants ou les points d’apport volontaire par les agents valoristes pour être ensuite envoyées au centre d’incinération de Valserhône, dans l’Ain. Cela représente un peu plus de 220 kilos par habitant dont la moitié sont des déchets recyclables : le «non fibreux» (environ 10 kg), le «fibreux» (environ 20 kg), le verre (environ 14 kg) et les déchets organiques destinés au compostage qui représentent la plus grosse quantité de ces déchets non triés.
La collecte des déchets est considérée par certains habitants de Rumilly comme étant mal organisée : des amoncellements d’ordures et d’encombrants, parfois non ramassés pendant plusieurs jours voire semaines, sont régulièrement constatés autour de divers points d’apport volontaire.
Yohann Tranchant, vice président de la Communauté de communes en charge de la prévention des déchets et milieux aquatiques, également maire de la commune de Sales, apporte quelques éléments de réponse concernant ces problématiques.
«50% des déchets recyclables sont déposés dans les poubelles grises»
Comment expliquez-vous ce phénomène d’encombrants et de déchets qui s’amoncellent au pied de certains points d’apport volontaire à Rumilly ?
«Je tiens d’abord à préciser que ce n’est pas un problème propre à Rumilly mais à toute l’intercommunalité. Concernant les observations récentes de certains habitants, quant au dépôt conséquent de déchets ou d’encombrants au pied des points d’apport volontaire, n’est-ce pas la période des fêtes de fin d’année qui a généré plus de déchets ? Ou une nouvelle opération immobilière qui vient d’être livrée et n’a pas encore les conteneurs prévus, surchargeant l’offre existante ? On peut se poser la question.
En parallèle, si le tri était fait correctement, les conteneurs ne déborderaient pas, les ordures seraient mieux réparties. 50% des déchets recyclables sont déposés dans les poubelles grises qui forcément se remplissent plus vite. Mais nous n’allons pas pour autant incriminer tous les habitants car il faut peut-être admettre qu’à certains endroits, les conteneurs sont sous-dimensionnés par rapport à la tournée hebdomadaire, et dans ce cas-là, nous sommes fautifs. Sans parler de la problématique du suremballage, qui même s’il y a une évolution et de plus en plus d’alternatives, ne laisse pas toujours le choix au consommateur.
Nous observons également que certains individus déposent leurs ordures à côté des colonnes et des bacs même lorsqu’ils sont vides. Est-ce à cause du Covid, est-ce la réticence à l’idée de toucher tout ce qui est collectif ? Le tout étant de savoir si ce problème est ponctuel ou aura tendance à se généraliser.»
Un service de ramassage des encombrants ne faciliterait pas la vie des habitants ?
«Nous avons inauguré, en septembre 2021, la déchèterie dans sa nouvelle réhabilitation qui a été assez lourde en terme de budget. Elle offre de nouveaux services adaptés aux besoins des habitants et permet le dépôt d’encombrants et de cartons bruns. Il est vrai que certaines personnes ne sont pas véhiculées ou n’ont pas internet pour s’inscrire ; pour ce public-là, nous pourrions proposer une offre ciblée qui serait à caractère social. Nous avons également conscience que cette déchèterie est accessible de façon plus contraignante pour les habitants de certaines communes un peu éloignées que pour les Rumilliens. Par ailleurs, si un service de ramassage d’encombrants était mis en place, qui paierait ? Le contribuable.»
«Le budget des déchets se tend»
Le phénomène des dépôts sauvages s’amplifie ?
«Concernant les dépôts sauvages sur le domaine public, passibles d’amende et de poursuites, c’est à la police du maire et non à la Communauté de communes de gérer ce fléau. Nous avons un règlement de collecte bien spécifique et lorsqu’un déchet est déposé dans la rue ou même au pied des colonnes, que ce soit une ordure ménagère ou un encombrant, ce n’est plus notre compétence.
Les dépôts d’encombrants aux abords des points d’apport volontaire, c’est un fléau. Les dépôts de professionnels qui, par exemple, déposent du plâtre aux endroits réservés aux ordures ménagères, c’est un fléau. Pour autant, nous ne pourrons pas mettre de caméras à proximité des 255 conteneurs répartis dans 114 points d’apport volontaires et des 1400 bacs roulants.
Concernant le domaine privé, les syndicats de copropriété et les bailleurs sociaux se sont déjà mobilisés. Ils dépensent des sommes colossales pour prévenir ces dépôts sauvages dont ils ont la responsabilité car certains points d’apport volontaires sont dans les résidences locatives. Lorsque les conteneurs se situent aux abords du domaine public, certaines personnes en transit considèrent que c’est une déchèterie locale.
Nous sommes dans une sorte de cercle vicieux quand ces déchets-là sont enlevés rapidement, pour la salubrité publique. Cela donne raison à ceux qui les déposent car le service est fait et à la fin qui paie ? Là aussi, c’est le contribuable. Le budget des déchets se tend, nous sommes sur une ligne de crête entre répondre à ces besoins de la population et ne pas accroître la fiscalité des déchets. En répartissant mieux les déchets, il y aura moins d’incinérations, 110 kilos de trop sont brûlés chaque année, et nous pourrons peut-être déployer davantage d’actions de prévention pour enfin entrer dans un cercle vertueux.»
Pourquoi certains points d’apport volontaire ne sont pas équipés d’une colonne à carton?
«Il est vrai qu’aujourd’hui non n’avons pas une colonne à carton dans chaque point d’apport volontaire mais pour autant le carton n’a rien à faire dans la poubelle grise. Il peut être stocké pour ensuite partir en déchèterie. Le manque de place à certains endroits a dû obliger la collectivité à faire des choix, mais sur les prochains points d’apport volontaire que nous créerons, nous devrons faire en sorte qu’il y ait tout le panel de tri.»
Les commerçants et professionnels, dans tout ça ?
«Une offre, initialement proposée par le CAE, pour les petites entreprises du centre-ville afin de leur faciliter la vie en faisant une collecte de cartons bruns, a été reprise par la Communauté de communes qui poursuit ce ramassage dans le centre chaque mercredi matin. Des particuliers en profitent aussi et là encore, ça déborde. Ce service a été victime de son succès, et des réflexions vont être engagées. En fonction de l’avancement de l’étude, nous pourrions décider de prendre les devants pour expérimenter une collecte hebdomadaire séparée, pour les professionnels et les particuliers.»
« 21% de ce qu’on met dans la poubelle grise devrait aller au compostage »
Et qu’en est-il du compostage ?
«21% de ce qu’on met dans la poubelle grise devrait aller au compostage. Plus de 50 kg par habitant par an, dont 15 à 20 kg de déchets alimentaires non entamés. Des ateliers pour apprendre à composter sont proposés et seront déployés cette année en prévision du 1er janvier 2024 où la loi imposera aux collectivités d’avoir une politique de séparation des biodéchets. Nous anticipons cette orientation nationale en investissant dans des composteurs qui seront mis à disposition des particuliers à prix attractif. Nous fournirons le matériel et en parallèle, nous aurons une animation à assurer pour les citoyens. Nous mettons également en place un suivi des composteurs collectifs déjà implantés pour s’assurer que tout soit bien brassé. Le compostage est notre grand axe de progression.»
Prévention et facilitation
«Notre mission, c’est la prévention et la facilitation du geste de tri. Nous avons également des engagements à tenir pour mettre les volumes en adéquation avec une population qui s’accroît, avec des besoins sociétaux qui évoluent. Nous devons être à l’écoute et réactifs. Notre rôle étant de sensibiliser, nous avons pensé à la création d’une recyclerie et venons de lancer une enquête auprès de la population, jusqu’au 9 février.»
Enquête sur la création d’une recyclerie
«Nous interrogeons les habitants sur leurs habitudes de consommation d’articles d’occasion, d’utilisation de leurs propres articles devenant ou devenus hors d’usage pour eux-mêmes. C’est une façon de tâter l’appétence de la population vers ce type de structure qui permettrait de sensibiliser à la consommation des produits, à la réparation d’objets. Des ateliers créatifs pourraient être organisés avec les déchets. Et nous espérons pouvoir faire travailler des personnes en réinsertion professionnelle. Tout un tas de pistes sont explorées. Cette création de recyclerie est un des axes pour réduire d’une part les dépôts sauvages, les dépôts en déchèterie et pour éviter la surconsommation de produits neufs.»
Plus d’infos sur le projet de recyclerie : http://www.rumilly-terredesavoie.fr/Environnement/Prevention-et-Valorisation-des-Dechets/Je-me-renseigne-sur-le-projet-de-creation-d-une-recyclerie