AlphaM.3D pense au «bâtiment de demain» et innove dans la construction hors site
AlphaM.3D, filiale du groupe Pelletier créée en 2013, a inauguré son nouveau site de production vendredi 29 septembre à Rumilly. L’entreprise investit 4,5 millions d’euros pour la construction 3D hors site de modules destinés au bâtiment. Cette alternative aux méthodes traditionnelles de construction pour l’habitat, le tertiaire, les hôtels ou encore les équipements publics, a pour objectif de répondre aux enjeux économiques et environnementaux ainsi qu’aux diverses problématiques actuelles du secteur du BTP dont la crise du logement, en se projetant dans le «bâtiment de demain».
Le groupe Pelletier s’est rapproché d’Yves et Eric Mathelon, deux frères issus du monde de l’industrie métallurgique depuis trois générations et confondateurs d’AlphaM.3D (jusqu’alors Alpha-Modules). Ces derniers ont conçu et développé, aux côtés de l’architecte lyonnais Bruno Curis, ce système constructif modulaire dédié à l’habitat, en intégrant dans un même cadre métiers du bâtiment et process industriel et en combinant des mix de matériaux. Leur philosophie : «utiliser le bon matériau au bon endroit». Après une transition numérique, énergétique et environnementale, le groupe Pelletier se lance ainsi dans la transition industrielle. «Nous avions des besoins communs et nous sommes donc associés pour passer le cap de l’industrialisation. Jusqu’à présent, nous faisions plutôt du semi artisanal» explique Alexis Pelletier, directeur d’AlphaM.3D.
«On ne pourra plus demain construire comme avant»
Patrick Pelletier, président du groupe Pelletier, souligne la nécessité de réagir et d’innover, notamment face aux nouvelles normes en faveur des bâtiments moins énergivores telle la règlementation environnementale 2020 (RE2020) : «Aujourd’hui, tous les acteurs de la construction doivent réfléchir la construction autrement. On ne pourra plus demain construire comme avant». De plus, dans un contexte de hausse des taux d’intérêt, du prix des matériaux, de pénurie de main d’oeuvre qualifiée, «le logement et la construction sont aujourd’hui au centre des intérêts». L’objectif de cette nouvelle approche est donc de répondre aux divers enjeux et problématiques du BTP (besoin de qualité et de durabilité, lutte contre la pénibilité des métiers et contre l’accidentologie sur les chantiers, maîtrise de la hausse des prix de la construction en optimisant les achats de matériaux et en réduisant le temps passé sur site). «La production hors site n’est pas soumise aux aléas climatiques et aux calendriers successifs des différents corps de métiers. La livraison par camion intervient quand les fondations sont terminées et l’assemblage débute aussitôt, avec des délais moins longs que ceux de la construction traditionnelle. La rapidité d’installation est un enjeu central de la crise du logement actuelle. Selon la taille des bâtiments, le gain de temps peut être de 60%» constate Alexis Pelletier.
Optimiser l’utilisation des matériaux
Réalisés en usine, les modules AlphaM.3D sont composés d’une dalle en béton, d’une ossature métallique ou béton, de panneaux isolés à ossature bois en façade. La structure de l’ensemble, équipé des lots techniques (électricité, plomberie, chauffage, ventilation…) et peint en atelier, permet de réaliser des bâtiments jusqu’à cinq niveaux. La dalle autoportante du module et les systèmes d’assemblage et de démontage conçus par AlphaM.3D sont protégés par des brevets.
«Notre procédé permet d’optimiser l’utilisation des matériaux. La dalle autoportante utilise 12 centimètres de béton ; c’est 8 centimètres de moins qu’en construction traditionnelle. Nous faisons le choix de matériaux biosourcés pour réduire l’empreinte carbone du bâtiment terminé. Nous avons travaillé sur des systèmes d’assemblage innovants permettant le démontage des bâtiments en fin de vie. L’ambition est de pouvoir démonter les modules, les reconditionner et les remonter ensuite pour un autre usage» commente Alexis Pelletier. Grâce à ce procédé, les chutes de produits et les déchets de construction sont réduits.
Baisse de 40% de l’impact carbone
Installée sur un terrain de 10 000m2, cette nouvelle usine vient remplacer un atelier d’environ 800m2. Les choix de conception et d’exploitation de l’unité de production participent à la décarbonation globale de l’acte de construction. Les panneaux photovoltaïques sur la toiture sont destinés à produire l’énergie nécessaire au fonctionnement de l’usine et l’électricité supplémentaire est achetée par un opérateur proposant une traçabilité «verte». Enfin, un circuit fermé permet de filtrer les eaux de lavage et de les réutiliser. La construction hors site apporte des réponses à l’impact environnemental de la construction immobilière. Le choix des matériaux, l’utilisation des bons composants au bon endroit et la baisse des déplacements domicile-travail des opérateurs ont des conséquences positives sur l’impact carbone de la construction, de l’ordre de 40 %.
Gain de 20% par rapport au prix du marché traditionnel
Ce nouveau procédé permet un gain de 20% par rapport au prix du marché traditionnel. «Aujourd’hui, les problématiques de main d’oeuvre dans le bâtiment entraînent des problématiques de qualité et donc de sinistralité. Le hors site 3D a pour objectif une qualité industrielle pour avoir des bâtiments plus durables. Notre cheval de bataille, c’est le triptyque délai, prix qualité» souligne Alexis Pelletier. Les modules préfabriqués permettent la réalisation de bâtiments allant jusqu’à R+4 (rez-de-chaussée+quatre étages) en zone sismique 4.
L’investissement de 4,5 millions d’euros (achat du foncier, construction du bâtiment, développement et installation du process industriel…) permettra de produire quatre à cinq modules de 15m² par jour, soit 60 à 75m², et de les stocker avant livraison sur les chantiers. À pleine capacité, l’unité emploiera une trentaine de personnes.