Ce bois qu’on croyait perdu est en train de tout changer

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Chalet en rénovation.

Chalet en rénovation. - ©Préfecture Savoie

5 clés pour saisir l'enjeu du bois scolyté en Savoie

Depuis quelques années, les forêts de Savoie subissent une attaque massive de scolytes, de minuscules insectes xylophages aux conséquences dramatiques. Face à l'ampleur des dégâts, des collectivités, en lien avec les acteurs de la filière bois, imaginent des solutions concrètes pour transformer cette menace en opportunité. Exemple marquant : la commune de Beaufort, qui reconstruit un chalet d'alpage en utilisant du bois local... et scolyté. 

1. Scolytes : un fléau silencieux qui transforme le paysage savoyard

Depuis 2022, les scolytes ont infesté les forêts résineuses de Savoie et Haute-Savoie, provoquant la mort rapide de nombreux épicéas. Ces insectes, invisibles à l'œil nu, creusent des galeries sous l'écorce, empêchant la sève de circuler et condamnant les arbres en quelques semaines. Résultat : en 2024, plus de 50 % des bois récoltés étaient classés « sanitaires », c'est-à-dire issus d'arbres malades ou mourants, soit 124 000 m³ d'épicéas scolytés sur les 330 000 m³ récoltés. Et la tendance s'aggrave : le début de l'année 2025 dépasse déjà les volumes atteints à la même période l'année précédente.

2. Beaufort, un exemple concret de valorisation locale du bois scolyté

Dans ce contexte, la commune de Beaufort innove en reconstruisant un chalet d'alpage sur le site de Cuvy avec du bois issu de ses propres forêts, dont de l'épicéa scolyté. Objectif : améliorer les conditions de logement des alpagistes, ces travailleurs saisonniers essentiels à l'activité pastorale d'altitude. Le bâtiment, de 100 m², accueillera deux chambres, une pièce de vie, des sanitaires, un cellier et un local de stockage. Ce projet illustre une volonté forte : faire de la crise une ressource, en valorisant un matériau souvent délaissé.

3. Le bois scolyté : un matériau fiable et durable

Longtemps considéré comme inutilisable, le bois scolyté revient aujourd'hui sur le devant de la scène. Abattu à temps, il conserve toutes ses propriétés mécaniques. Seule une légère teinte bleutée - due à un champignon véhiculé par l'insecte - le distingue visuellement. Or cette coloration n'altère en rien sa solidité. Résultat : ce bois devient une alternative crédible et écologique pour la construction. À Beaufort, son utilisation montre qu'un bois marqué peut aussi rimer avec qualité, fiabilité et durabilité.

4. Un soutien institutionnel fort à l'échelle départementale

Ce chantier, d'un coût total de 253 000 euros, bénéficie d'une subvention de l'État de 100 000 euros. Il s'inscrit dans un plan plus large de soutien à la filière bois, fragilisée par la prolifération des scolytes. Aux côtés du Conseil départemental de la Savoie, l'État mène une politique active de gestion durable, via des financements, de l'accompagnement technique et une stratégie coordonnée. La cellule de crise Scolytes, créée en mai 2024, illustre cette volonté : rassembler les forces - publiques, privées et professionnelles - pour faire front ensemble.

5. Une filière forêt-bois à repenser, mais riche d'atouts

La Savoie compte 217 000 hectares de forêts, soit un tiers de son territoire. La filière forêt-bois y est dynamique : 900 entreprises, 3 500 emplois, et près de 30 % de la surface forestière occupée par des épicéas. Chaque année, 240 000 m³ de bois sont récoltés, dont 48 000 m³ de bois énergie. Mais face à la crise, il faut adapter les pratiques. C'est tout le sens des actions menées par le Pôle Excellence Bois et l'Association des Communes Forestières, qui forment et accompagnent les professionnels, diffusent de l'information technique et promeuvent une gestion responsable certifiée PEFC.

Une vue du bois utilisé. - ©Préfecture Savoie
Une vue du bois utilisé. - ©Préfecture Savoie
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