Tiré au sort pour la 3 Convention citoyenne, cet Aixois raconte son expérience
Patrick Chanut lors d'une de ses prises de parole devant l'hémicycle. - ©DR
C'est une expérience dont Patrick Chanut se souviendra. Cet Aixois de 72 ans a activement participé à la Convention citoyenne sur les temps de l'enfant, après avoir été tiré au sort parmi 132 autres citoyens partout en France qui représentent la diversité de la société. "C'était passionnant et constructif". Un panel de 20 enfants et adolescents a également été associé au dispositif et une trentaine d'ateliers ont été menés dans chaque région française pour prendre en compte les spécificités territoriales. Il s'agit de la 3e convention citoyenne sous Emmanuel Macron, après celles sur le climat (2020) et sur la fin de vie (2023).
Améliorer les temps de la vie quotidienne des enfants
Cette nouvelle Convention citoyenne a été annoncée le 2 mai 2025 par le président de la République puis son organisation confiée au Conseil économique, social et environnemental (CESE) qui a pour mission d'associer les citoyens à la vie démocratique.
La question posée par le Premier ministre du moment François Bayrou dans une lettre de saisine était "comment mieux structurer les différents temps de la vie quotidienne des enfants afin qu'ils soient plus favorables à leurs apprentissages, à leur développement et à leur santé ?". Cette assemblée de citoyens avait vocation à formuler "collectivement" des propositions"réalistes" pour améliorer les rythmes des enfants (moments de la journée et de l'année où un enfant apprend, joue, se repose, incluant les temps scolaire, périscolaire, extra-scolaire et le temps libre).
"Nous avons dû nous mettre d'accord, cela n'a pas toujours été facile"
Durant 7 sessions de 3 jours entre juin et novembre (soit 21 jours de délibérations),les participants se sont réunis au CESE à Paris, "où nous avons pu nous informer auprès d'experts, d'institutionnels et d'acteurs de terrain" explique Patrick Chanut, soit au total 77 auditions. "Il y a eu des politiques, des syndicats, des représentants de fédérations de parents d'élèves mais aussi des philosophes, des sociologues, des thérapeutes...que ce soit dans l'hémicycle où ils sont venus s'exprimer ou dans les ateliers où nous les avons rencontrés de plus près".
Après avoir partagé leurs vécus, délibéré et débattu, "nous sommes partis d'une page blanche puis nous avons dû nous mettre d'accord, cela n'a pas toujours été facile", ces citoyens âgés de 19 à 83 ans ont formulé 20 propositions pour "rendre l'organisation du temps des enfants favorable à leur bien-être et leurs apprentissages" (rapport rendu le 23 novembre). Pour qu'une proposition soit adoptée dans le rapport et non rejetée, "elle devait remporter au moins 66% des votes".
20 propositions à destination des responsables politiques
Face au constat "préoccupant" que les temps de l'enfant "sont inadaptés à leurs besoins" car "plutôt construits autour de contraintes" (rythmes scolaires inadaptés aux rythmes biologiques, temps libre trop limité, enfants fatigués et sous pression, omniprésence des écrans...), ces propositions auront pour but d'aider les responsables politiques à écrire des lois "adaptées aux défis, aux besoins et aux réalités des Français".
Patrick Chanut nous en présente quelques-unes, rapport dans les mains : reculer le début des cours à partir de 9h au collège et au lycée, garantir à chaque enfant une pause méridienne d'une heure et demie et avec des temps de liberté, faire en sorte que les devoirs soient faits à l'école avec des revoir à la maison, respecter l'alternance entre 7 semaines de cours et 2 semaines de vacances en réduisant les zones de 3 à 2 pour les vacances d'hiver et de printemps,
rendre obligatoire l'organisation par les établissements scolaires de plusieurs temps de rupture dans l'année avec au moins un séjour/voyage par an, mettre en place un plan de mobilité jeunes ou encore créer un ministère de l'Enfance... "Certaines seront peut-être plus dures à convaincre que d'autres".
"S'il n'y a pas de suite, cela ne sert strictement à rien"
"S'il n'y a pas de suite, cela ne sert strictement à rien" assure le septuagénaire aixois. "La plupart d'entre nous en étant convaincus, nous avons l'intention de créer assez rapidement une association à l'échelle nationale qui regrouperait les anciens de cette Convention citoyenne. Puis chacun dans son coin fera les liens nécessaires".
Le jeune retraité (expert en gestion copropriétés, relation clients et management), passionné de nature, de botanique, de photo et qui ne manque pas d'activités diverses notamment dans le milieu associatif, songe à créer en complément un groupe de séniors, des "boom-boosters" plutôt que des "boomers" s'amuse-t-il à dire (en référence au terme employé par François Bayrou). "Les séniors ont aussi un rôle à jouer car la séniorité c'est le recul, la sagesse et le temps".
"Les politiques ont d'autres soucis en ce moment mais c'est l'enfance qui devrait être prioritaire"
Patrick Chanut a pris plusieurs fois la parole dans la tribune face à l'hémicycle. Il a notamment évoqué l'ouvrage "Main basse sur l'Education nationale : enquête sur un suicide assisté", "nous en sommes d'ailleurs venus à dire qu'il faudrait parler d'instruction nationale car ce n'est pas à l'école de faire l'éducation des enfants mais à leurs parents et leur entourage proche". Il a également déploré que "les politiques ont d'autres soucis en ce moment mais c'est l'enfance qui devrait être prioritaire. Actuellement, on parle de dissolution, révocation, démission, retraite... Et les enfants ils sont où là-dedans?"
Une prise de parole acclamée !
Lors de son intervention faisant office de conclusion, il a été acclamé sous les applaudissements après avoir adressé un message à l'ancien Premier ministre : "Monsieur Bayrou, ceci n'est pas un Himalaya, non, mais une véritable mine. Une mine où extraire un trésor pour le futur. Tout est faisable. Et nous vous confions ce trésor".
Selon Patrick Chanut, ce rapport doit être "une opportunité à saisir pour améliorer rapidement et durablement la vie de nos enfants. Nous souhaitons qu'elle serve de base pour fixer un cap ambitieux permettant d'avancer ensemble". Ce grand-père de trois petites-filles était ému de dire que "Nos enfants, avec toutes leurs différences, ont des droits, et il nous appartient de les défendre. Prenons soin de nos enfants".
"Chacun doit poursuivre dans son territoire"
C'est dans le contexte de cette Convention citoyenne que Patrick Chanut est entré en contact avec la Maison de la Parentalité et des Familles (voir article du 20/11), sur les conseils"précieux" de l'adjointe à l'éducation, l'enfance et la jeunesse Chrystèle Anciaux. "Pour que nos travaux servent à quelque chose, chacun doit poursuivre dans son territoire. Certains voudraient que des groupes se constituent par ville ou région. Car le but aujourd'hui est de promouvoir ce rapport".
Renforcer le cadre légal des aides à la parentalité fait partie des propositions formulées. "Avec Céline Mathieu, directrice de la MDPF, nous sommes tombés d'accord sur la force du lien entre les générations et l'importance de l'attachement intergénérationnel" sourit l'Aixois. Tous deux soulignent la nécessité de tenir compte "des besoins fondamentaux de l'enfant" et en sont convaincus : "Plus on investit dans l'enfance, plus on bâtit une société apaisée et heureuse".





