Le renoncement à la distribution postale de la presse ouvre la voie aux déserts de l’information

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La presse est aujourd'hui plongée dans une profonde transformation sous l'effet du numérique.

La presse est aujourd'hui plongée dans une profonde transformation sous l'effet du numérique. La hausse constante du nombre d'abonnements et des audiences en ligne témoigne de son adaptation réussie aux nouveaux usages.

Cependant, une partie importante de nos lecteurs reste attachée au journal papier, dont plus de 2 millions d'exemplaires continuent à être livrés tous les jours et qui fournit 80% des revenus du secteur - permettant notamment de financer les investissements nécessaires dans le numérique.

Cet équilibre fragile est aujourd'hui remis en cause par l'augmentation vertigineuse des coûts de distribution - et particulièrement par la perspective d'une augmentation brutale des tarifs postaux.

Le service public de distribution postale de la presse, institué par la loi, est en effet un rouage essentiel de la chaîne de l'information, qui permet de servir les lecteurs situés dans les zones les plus isolées.

Les conditions de cette mission sont aujourd'hui remises en cause : alors que la Poste et l'Etat s'étaient engagés à plafonner les augmentations tarifaires jusqu'en 2027, ils s'apprêtent aujourd'hui à revenir sur leur signature, en augmentant massivement le prix du transport postal.

Une telle décision remettrait en cause, pour nos concitoyens situés dans les zones les moins denses du territoire, la disponibilité de leur journal ou de leur magazine à un coût raisonnable.

Quelles sont les raisons d'un tel revirement ?

La Poste prétend que les coûts de distribution de la presse auraient augmenté de 40% en 2023, et ce alors même que les volumes distribués baissent continuellement ; que ces coûts seraient désormais " insupportables ", alors qu'elle a réalisé 1,4 milliard d'euros de bénéfice l'année dernière...

Il est tentant de penser qu'il s'agit plutôt de faire peser sur les éditeurs les conséquences financières du recul des volumes du courrier postal. Si le coût des missions de service public n'est pas entièrement compensé, ce n'est pas aux éditeurs et aux lecteurs de presse d'y remédier.

Après la désertification des territoires en matière de commerces, d'infrastructures, de médecins, allons-nous assister à la fin d'un des derniers services publics bénéficiant à tous les Français de façon égalitaire ? Ainsi, l'on aurait en France une Poste capable de livrer dans de bonnes conditions tous les colis Tému, mais pas la presse ?

A l'approche d'échéances électorales importantes, et alors que la désinformation en ligne devient massive, affaiblir la distribution d'une information fiable et pluraliste est un danger pour notre démocratie, que les pouvoirs publics ne peuvent ignorer. L'étude publiée récemment par les Relocalisateurs et la Fondation Jean Jaurès il y a quelques semaines a encore mis en évidence le lien entre l'attachement aux valeurs démocratique, la participation électorale et l'accès aux médias.

L'Etat doit ici jouer son rôle et respecter sa signature en garantissant les conditions de la distribution

postale.

Pourquoi cette tribune ?

La Poste a récemment notifié à plusieurs éditeurs une augmentation significative de ses tarifs de distribution, en rupture avec le protocole d'accord signé en 2022 qui garantissait une prévisibilité tarifaire jusqu'en 2027. Face à cette remise en cause unilatérale, les trois principales organisations représentatives de la presse française s'expriment d'une seule voix. L'Alliance de la presse d'information générale, le SEPM et la FNPS rassemblent plus de 2 500 publications qui emploient 65% des journalistes français.

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