Aixam : succès des voitures sans permis
Avec une part de marché de 57,6% le mois dernier, Aixam, célèbre entreprise basée à Aix-les-Bains depuis 1983, est le n°1 en France et en Europe des voitures sans permis. Ses 3 clients majeurs sont la France, l’Italie et l’Espagne. Avec une vitesse limitée à 45 km/h, ce véhicule considéré comme une véritable alternative aux cyclomoteurs et aux transports en commun, permet à toute personne ne possédant pas le permis de conduire de circuler librement, en milieu rural ou urbain, dans le confort et en toute sécurité. En 2021, Aixam a donné un coup d’accélérateur. Il s’agit de la meilleure année en terme de ventes depuis sa création : 16 500 véhicules produits, dont 1700 en octobre, mois de tous les records. Philippe Colançon, PDG de l’entreprise, explique que le marché s’est grandement développé dès l’ouverture sur l’Europe, même si le plus gros client reste la France : « Pendant les 10 premières années, on produisait environ 4 000 véhicules par an, et on est passé à 10 000 à la fin des années 1990 avec une distribution en Espagne et en Italie ». Proposant une gamme de qualité, moderne, avec des modèles de plus en plus solides et des finitions bien soignées, Aixam est devenue la solution incontournable de la liberté de conduite sans permis.
Alternative aux transports en commun
et aux cyclomoteurs
Comme l’indique le PDG, la crise sanitaire semble avoir été un élément déclencheur pour de nombreuses personnes qui, voulant éviter le brassage imposé des transports en commun, ont cherché un mode de déplacement individuel : trottinettes électriques, vélos électriques et…voitures sans permis. Même si les principaux utilisateurs sont les personnes âgées et surtout les jeunes entre 14 et 18 ans, de nombreux actifs n’ayant pas leur permis, l’ayant perdu, ou n’ayant pas conduit depuis longtemps ont opté pour l’utilisation de ce genre de véhicule, à la ville comme à la campagne, afin de se déplacer en toute liberté sans les contraintes des transports publics ou des deux-roues moins sécurisants et moins confortables. Les voitures sans permis permettent d’aller étudier, travailler, sortir se divertir ou faire ses courses avec toute la sécurité et le confort nécessaires.
Rajeunissement
de la clientèle
Pendant les premières années, la voiture sans permis avait une connotation de « moyen de transport pour les personnes âgées ». Au fil des décennies, l’entreprise aixoise a souhaité rajeunir sa clientèle, en modernisant ses modèles et en misant sur une communication bien ciblée. « Jusqu’à la fin des années 1990, 95% des clients étaient des retraités vivant à la campagne et à la fin des années 2000, les 2/3 étaient des actifs. Entre 2002 et 2008, les ventes annuelles sont passées de 10 000 à 15 500 véhicules, soit une augmentation de 10 % par an » précise Philippe Colançon.
Le succès auprès des jeunes a commencé en Italie, et l’entreprise a tout mis en œuvre pour attirer la jeunesse française. Elle a pour cela décidé d’optimiser sa communication en créant notamment des postes spécifiques comme le community management.
« Cela n’a pas été facile de faire comprendre aux gens qu’en définitive, le véhicule que l’on propose peut être conduit dès l’âge de 14 ans, comme un cyclomoteur, avec le permis AM pas très compliqué à obtenir (obligatoire pour les personnes nées après le 1er janvier 1988), qu’il ne s’agit pas d’une automobile classique, mais on a fini par réussir. Dès 2015, pendant que le marché des jeunes explosait en Italie, on a commencé à avoir des clients dans le sud-est de la France (dans les départements Alpes-Maritimes, Var, Bouches-du-Rhône). Il a donc fallu convaincre les jeunes eux-mêmes mais également les parents, qui sont les financeurs » commente Philippe Colançon.
La voiture sans permis a deux rôles majeurs : un rôle social pour désenclaver les campagnes, car elle permet aux personnes isolées vivant dans des lieux peu ou pas desservis par les transports en commun de se déplacer à leur guise, et un rôle sécuritaire pour tous, que les parents semblent avoir bien compris :
« On est évidemment mieux protégé de l’accidentologie dans ce genre de véhicule que sur un scooter, et quand il pleut on est mieux dans une carrosserie fermée. Et puis il y a le confort intérieur qui s’est amélioré au fil du temps grâce aux divers équipements proposés, notamment en terme de connectivité : certains modèles sont équipés d’une tablette connectée ».
L’autre avantage de ces voiturettes : permettre aux jeunes d’être autonomes, sans être tributaires de leurs parents ou des transports publics. Philippe Colançon cite l’exemple d’un jeune résidant à Rumilly qui se rend quotidiennement à son école basée à Annecy ou encore celui de nombreux jeunes aixois qui étudient à Chambéry.
Crise sanitaire
Le PDG d’Aixam confie que le principe général de la boite est d’être la plus réactive possible pour s’adapter au mieux aux situations imprévues. Concernant la crise sanitaire, le bilan de 2020 est, selon lui, loin d’être négatif :
« Lors du 1er confinement, la production s’est arrêtée 4 semaines. Concernant l’activité d’assemblage et de fabrication, les gens sont assez isolés les uns des autres, ce qui a facilité la reprise. 95 % de nos employés avaient hâte de reprendre l’activité. On a redémarré 15 jours avant le déconfinement, car je voulais que l’on anticipe afin de pouvoir livrer les distributeurs sans délai. On a redémarré sur des quantités moindres car c’était compliqué d’avoir du personnel intérimaire. Mais dès le mois de juin, on s’est rendu compte que les commandes pleuvaient. 2020 fut donc une année légèrement en baisse, en sachant qu’on s’était arrêté 1 mois. Concernant 2021, on n’a jamais eu autant de carnets de commande: avant, je pouvais livrer le véhicule en 4 semaines, actuellement le délai de livraison est de 3 mois ».
Pénurie de composants électroniques
Quant à la pénurie mondiale de composants électroniques, Aixam n’est absolument pas concernée, contrairement aux constructeurs automobiles « classiques » dont certains ont été contraints de fermer leurs usines. « Le raisonnement général de la boite est « simple is beautiful », et jusque dans nos produits, on a toujours fait en sorte que ce soit le plus simple possible. Ainsi, dans les composants que l’on utilise, il y a peu d’électronique, ce qui, en plus d’améliorer la fiabilité dans certains cas, nous a évité d’être pénalisés par cette pénurie » se réjouit Philippe Colançon. Cependant, il admet que la période est tout de même compliquée et que des problématiques nouvelles à régler sont quotidiennement rencontrées au sein de l’entreprise. Par exemple, des pertes ont été constatées concernant la production de septembre (heureusement rattrapées dès le mois d’octobre), liées à un tout autre problème : la difficulté à recruter du personnel.
« Pour l’instant on s’en est bien sortis, on s’en sort encore, mais est-ce qu’on s’en sortira complètement ad vitam aeternam ? Je n’en suis pas certain ».
L’Aixam de demain ?
« On est convaincus que 100% de notre avenir, c’est l’électrique.»
La gamme électrique, venue compléter en 2011 la gamme thermique, représente un faible pourcentage des ventes. En 2021, 350 voitures électriques ont été produites. Philippe Colançon est persuadé qu’il y aura une accélération quantitative de ces modèles dès l’année prochaine, qu’il en sera produit 10 fois plus, « parce que c’est la tendance générale ».
Dès le mois d’octobre, l’entreprise a diminué la taille des batteries sur sa gamme City pour pouvoir baisser le prix. Les modèles ont certes moins d’autonomie, passant d’une capacité de 100 km à 50 km, ce qui semble suffisant pour l’utilisation qui en est faite, en sachant que le véhicule est facilement rechargeable.
Le prix des voitures Aixam varie entre 8 500 et 15 000 euros, avec une valeur moyenne des ventes estimée à 12 000 euros.
Volonté de rester implanté en France ?
Malgré la vente d’Aixam, pour assurer son avenir, au groupe américain Polaris (leader mondial du quad et de la moto-neige), Philippe Colançon reste totalement libre dans sa gestion de l’entreprise et n’envisage pas d’aller produire à l’étranger, d’autant plus que les principaux clients sont les français, expliquant qu’à Aix-les-Bains, le succès est tel que si l’on prend le ratio des gens qui utilisent ces voitures sans permis et qu’on l’applique à l’ensemble du pays, il faudrait trois fois plus d’usines.
« 100 % de nos véhicules sont assemblés en France. Nous n’envisageons pas de partir ailleurs. Malgré certaines difficultés rencontrées ici, on reste attachés à l’idée de continuer la production dans le pays et dans la région. D’abord, parce que notre plus gros marché est la France, et puis parce que notre vision est d’insister sur l’importance de la notion du « made in France » qui convainc de plus en plus les gens. Nous avons certes des composants qui sont fabriqués à l’étranger, mais 100% de l’assemblage, du montage est fait ici, dans notre unité de production à Aix-les-Bains qui finalise 2/3 des produits et dans les 4 usines implantées à Chanas (en Isère, au sud de Lyon) où sont fabriqués les châssis et carrosseries et où est finalisé le tiers restant de la production. »
Le PDG insiste sur cette volonté de laisser Aixam enracinée sur sa terre d’origine et sur la nécessité de construire de nouveaux bâtiments tant la production est florissante, concluant que la principale force de l’entreprise est qu’elle orchestrée par des gens passionnés.