Bernard Marin : «Je soutiens Braissand à fond»

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Élu à Mognard depuis 1989, maire depuis 1992 et président de la communauté de communes du canton d’Albens (CCCA) de 1994 à sa dissolution en 2017, Bernard Marin est 
maintenant maire d’Entrelacs. Personnage historique du territoire, il a poussé à la création de la commune nouvelle d’Entrelacs, fusionnant six des huit communes du canton, avant de rejoindre l’autre grande intercommunalité, la CALB, devenue Grand Lac.
Ayant annoncé qu’il ne se présenterait pas aux prochaines élections municipales, préférant bénéficier d’une retraite méritée après 30 années au service de ses concitoyens, il revient pour nous sur se dernier mandat, qui aura été spectaculaire par l’œuvre achevée. Il parle aussi bien sûr de la fusion et donne son avis sur les prochaines élections. 

Pourquoi avoir lancé le projet de nouvelle commune sur le territoire ?
En novembre 2014, nous avons commencé à travailler sur le PLUi (plan local d’urbanisme), et, parallèlement à ça il s’est trouvé que la loi NOTRe allait faire que la communauté de communes du canton d’Albens ne correspondait plus aux règles et allait disparaître. Il fallait rejoindre une intercommunalité et nous avons choisi la CALB, qui est un peu notre bassin versant. Or, le fait qu’on aille vers de grosses agglomération, en tant que maire de Mognard, on fait un peu petit. Comme on travaillait bien ensemble dans la CCCA, on a voulu continuer et il y a eu cette idée de commune nouvelle. 

Est-ce qu’il y a eu des difficultés dans la création d’Entrelacs ?
Au début, on était partis à huit mais La Biolle et Saint-Ours, au moment du vote final, se sont retirées donc on s’est retrouvés à six pour créer une nouvelle commune de 6 000 habitants, ce qui nous permet d’être la deuxième commune de Grand Lac. Quand la commune nouvelle a été créée en janvier 2016, il a fallu réorganiser les services, fusionner les budgets, ré-attribuer les rôles administratifs… Ça a été énormément de travail. 
Ensuite, en 2017, il y a eu la fusion des deux communautés de communes, avec de nouveaux changements. La CALB n’avait pas les mêmes compétences que la CCCA donc il a fallu qu’Entrelacs en récupère certaines, comme la petite enfance ou le service jeunesse.

«Je ne regrette pas d’avoir fait ça»
Avec le recul, avez-vous des regrets ?
Je ne regrette pas d’avoir fait ça. Je dis bien «je» parce que je me suis beaucoup battu pour ça. Mais d’abord, ça nous donne des moyens financiers et en plus, ça nous donne une meilleure représentativité à Grand Lac que si nous étions chacun de notre côté. 

Depuis que vous êtes maire d’Entrelacs, quels ont été les projets que vous avez menés ?
On a beaucoup axé sur le scolaire. On a harmonisé le budget des six écoles pour qu’elles aient le même. La fusion nous a aussi permis d’embaucher un éducateur sportif pour aider les institutrices à faire des heures de sport pendant les heures d’école. Chose que la commune de Mognard, seule, n’aurait jamais pu faire, et que même une commune comme Albens n’avait pas non plus. Ensuite, on est passés à des repas avec la cuisine centrale Leztroy de Serrières, avec des repas en circuit court, bios, locaux. On a vu la différence avec beaucoup moins de gaspillage, les enfants finissent leurs assiettes. C’est quelque chose qui n’est pas neutre parce que le repas est facturé 4,30 euros alors qu’on l’achète maintenant 4,35€ et qu’il nous revient à 6 euros. C’est un effort qu’on peut faire parce qu’on est financièrement plus forts.

Avez-vous travaillé uniquement sur le scolaire ou il y a aussi autre chose ?
Le deuxième effort que je me suis engagé à faire c’est sur la sécurité. Quand je suis arrivé à Entrelacs, il y avait un seul policier municipal, qui n’était pas très bien équipé. On a donc embauché une deuxième policière et on les a équipés de tasers et de bâtons, ainsi qu’un véhicule. On a aussi fait l’acquisition avec Grésy-sur-Aix de jumelles pour contrôler la vitesse. On a mis des radars pédagogiques à différents endroits, parce que des fois les gens ne se rendent pas compte qu’ils roulent vite, et ça a permis de diminuer drastiquement les excès de vitesse. Enfin, d’ici à la fin janvier 2020, l’installation de caméras de vidéosurveillance sur tout le territoire de la commune va être finie. De 60 sur la commune déléguée d’Albens, on va passer à 110 sur tout Entrelacs. Ça va permettre de lutter contre les cambriolages grâce, entre autres, à un système de lecture de plaques minéralogiques automatique. 
Le maire ne devait pas être issu d’Albens

Pourquoi est-ce que c’est vous en particulier qui avez été choisi comme maire d’Entrelacs ?
Il y a eu différentes choses. J’étais président de la CCCA, j’étais à l’initiative de la commune nouvelle et, étant à la retraite, j’ai eu le temps de faire de la veille sur les textes de loi qui sortaient. Avec les autres communes, on s’était mis d’accord pour que lors du premier mandat, le maire ne soit pas issu d’Albens.

C’était pour éviter qu’Albens ne vampirise Entrelacs ?
Je ne veux prêter de mauvaises intentions à personne mais je pendes qu’involontairement ça aurait pu se faire. Quand vous êtes dans un endroit que vous connaissez bien, que la majorité des services sont déjà à Albens, que les gens y sont aussi… Ça a permis d’apporter un œil nouveau.

Comment s’est passée la transition ? Vous êtes passé d’une mairie de 450 habitants à une de 6 000.
J’étais déjà à la communauté de communes avant donc j’étais déjà habitué à gérer des budgets importants. Pour la mise en place des services, j’ai été cadre dans une filiale du Crédit Agricole donc je me débrouillais un petit peu du point de vue management. Bien sûr, on s’est fait aider, on a pris un audit pour nous aider à mettre en place l’organisation. 
Maintenant, j’ai trois pôles (technique, ressources humaines et administration), avec trois chefs de service et la directrice donc c’est très cadré. Ce sont toutes des personnes compétentes. Pendant le prochain mandat, celui qui prendra ma place, il aura quelque chose qui tourne, il n’aura pas à se poser la question.

Est-ce qu’il y a des derniers projets que vous souhaitez lancer avant la fin de votre mandat ?
On a un plan sur les économies d’énergie. On va lancer un appel d’offre pour un marché de gestion de performance pour tous les lampadaires. Il y en a environ 1 000, qui vont tous passer en LED. C’est un projet assez énorme, qui va coûter pas loin de un million d’euros mais qui permettre d’économiser 200 000 kW/h d’électricité par an ou 24 tonnes d’équivalent CO2. Pour l’instant on va rester sur les horaires d’éclairage normaux mais, avec un pilotage centralisé, la prochaine équipe pourra couper plus tôt, ou baisser la luminosité. J’aimerais bien qu’on devienne un «village étoilé», pour protéger la faune nocturne dans les endroits un petit peu reculés. 

En termes d’engagements, les avez-vous tenus ?
J’ai pris des engagements, et on les a tenus. On n’a pas fait d’emprunt ni modifié les taux d’imposition. Ils vont être lissés sur 12 ans, ce qui fait qu’ils n’augmenteront que de 20 ou 30 euros par an au lieu d’avoir une augmentation de 200 euros d’un coup. Autre engagement, je n’ai pas engagé de nouvelle dépense de fonctionnement. À part des remplacements, je n’ai embauché personne. 
«Il faut laisser la place aux jeunes»

Vous avez annoncé ne pas vous représenter aux prochaines élection de 2020. Pourquoi ?
Ça fera 31 ans que je suis élu, c’est déjà pas mal. J’aurai 70 ans, et la motivation baisse aussi un peu quand même. La commune nouvelle, c’était un projet énorme qui m’a pris beaucoup de temps et d’énergie, alors même si les projets à venir, comme les économies d’énergie, sont intéressants, j’ai la sensation qu’il me reste moins à faire que j’en ai fait. Et puis il faut laisser aussi la place aux jeunes, parce qu’ils n’ont pas toujours les mêmes idées que nous, même si on travaille en symbiose. Ça fait du bien qu’il y ait une remise en cause un petit peu. Pour moi c’est impératif.
«Que quelqu’un d’autre se présente ou pas, ça ne change rien : je soutiens Jean-François Braissand»
Allez-vous donner votre soutien à un candidat ou pas ?
Jean-François Braissand repart avec quasiment la liste actuelle. Au point de vue travaux, les économies d’énergie et tout ça, c’était quasiment mon bras droit. C’est quelqu’un de jeune, 52 ans, motivé, qui a l’esprit Entrelacs aussi, ça c’est important. Je suis sûr que lui, quand il va piloter Entrelacs, il va avoir une réflexion globale, tout en préservant les communes déléguées. Parce qu’on voit que les communes elles gardent toujours leur nom, leur âme. Moi j’habite toujours Mognard, par contre les services sont faits par Entrelacs. Il est soutenu par la plupart des autres maires délégués et c’est mon ancienne équipe. Je ne me vois pas ne pas soutenir mon ancienne équipe. Donc je soutiens Braissand à fond. Parce que c’est quelqu’un qui travaille, qui est sérieux, qui connait son boulot. Il est franc, il est droit. Un mec comme ça, c’est un mec en or.

À part Entrelacs, y a-t-il quelque chose dont vous êtes particulièrement fier dans votre mandat ?
Le PLUi. On avait 160 hectares qui étaient potentiellement constructibles en 2014. On en a rendu 100 à l’agriculture. Sur entrelacs, on les a d’ailleurs classés en zone agricole protégée, donc elles resteront agricoles pendant au moins trente ans. Ça garanti l’outil de travail des agriculteurs, qui investissent dans du matériel cher, pendant cette période. Je comprends aussi les propriétaires qui ne sont pas contents : ils avaient un terrain qu’ils estimaient à 150€ le mètre carré, c’est tombé à un euro. Forcément, ils n’allaient pas être très contents. Mais je suis content parce que ça permet aux agriculteurs de pouvoir regarder l’avenir plus sereinement. En plus on a des agriculteurs performants chez nous, qui en plus gagnent leur vie. Ils ne roulent pas sur l’or mais au moins ils valorisent leurs produits et il faut qu’on les aide.

Avez-vous un dernier mot à ajouter ?
Oui, et c’est important aussi : à Entrelacs, on a distribué 150 bons pour acheter des vélos électriques. On donne 200 euros en association avec Grand Lac qui donne la même chose. Donc quelqu’un de la commune qui achète un vélo électrique reçoit 400 euros de subvention. J’espère que les prochains mandats reconduiront la mesure parce que ça rentre dans le cadre des économies d’énergie. Demain avec Rumilly et Grand Lac on va faire une véloroute qui partira même d’Annecy, les gens pourront aller au travail en vélo électrique à Tefal ou à Hexapôle. Et puis je ne vais pas me tirer des fleurs mais je suis assez content de ce qu’on a fait. Parce que je sais qu’à Grand Lac, ils prenaient des paris sur le fait que je n’arriverais pas à créer la commune nouvelle. C’est sûr que ce n’était pas quelque chose de facile mais on l’a fait, tous ensemble.

 

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