EELV a organisé une projection-débat sur la problématique des «polluants éternels»
Jeudi 1er juin, les écologistes des Pays de Savoie ont organisé une projection-débat sur la problématique des PFAS dits «polluants éternels» au cinéma Les Lumières de la Ville de Rumilly. Près de 80 personnes ont assisté à la séance du film Dark Waters suivie d’un débat sur le thème «Mon eau est polluée, ma santé est-elle impactée ?». Ce film, sorti en France en 2020, relate l’histoire vraie d’un combat, celui de l’avocat américain Robert Bilott face à un puissant industriel de chimie producteur de téflon, accusé d’avoir pollué les cours d’eau aux PFOA (acide perfluorooctanoïque de la famille des PFAS), via des rejets toxiques de son usine, et affecté la santé des habitants.
«Nous inspirer de ce qui s’est fait aux Etats- Unis pour savoir peut-être quoi faire ici»
Pour l’occasion, les organisateurs avaient convié plusieurs intervenants, Philippe Chamaret (directeur de l'Institut Ecocitoyen pour la Connaissance des Pollutions (IECP) de Fos-Sur-Mer), Nicolas Thierry (député écologiste de la Gironde, auteur d'un projet de loi sur les PFAS), Marie-Charlotte Garin (députée écologiste du Rhône, département en partie impacté par la pollution aux PFAS) et deux représentantes de l'Institut Ecocitoyen du Pays du Mont-Blanc (situé dans la vallée de l’Arve confrontée à diverses problématiques de pollution). Ces derniers ont pu échanger avec le public, répondre aux questions et expliquer leur implication sur le sujet de la santé environnementale. L’objectif était de démontrer l’importance de la connaissance scientifique, comme l’a souligné Philippe Chamaret, «pour pouvoir améliorer la situation, à la fois pour la recherche, les acteurs industriels et les élus afin qu’ils prennent les meilleures décisions possibles. (…) Il faudrait une sorte d’observatoire national du PFAS, ou européen voire mondial, qui nous dise où on en est» et l’importance de l’implication citoyenne, «la population ne veut pas être rassurée mais plutôt assurée de savoir la réalité».
Pascal Sciabbarrasi, porte-parole d’EELV Pays de Savoie, a précisé que «pour Europe Ecologie Les Verts, le but n’est pas de porter un combat politique sur le sujet mais plutôt d’avertir les citoyens, de les informer de la situation et de nous inspirer de ce qui s’est fait aux Etats-Unis pour savoir peut-être quoi faire ici à Rumilly».
Une étude de bio-imprégnation bientôt lancée dans le sud lyonnais
Philippe Chamaret a expliqué que la Métropole de Lyon (dont le sud du territoire est touché par la pollution aux PFAS, notamment à Pierre-Bénite), s’est rapprochée de l’Institut Ecocitoyen de Fos-sur-Mer pour réaliser une étude de bio-imprégnation sur les habitants de la zone impactée, en mesurant le taux de PFAS dans leur sang. «L’objectif est de connaître l’étendue des pollutions constatées dans la Vallée de la chimie, de déterminer le niveau d’imprégnation des populations exposées, et de comprendre comment ces polluants éternels et toxiques migrent dans l’environnement et parviennent jusqu’aux organismes».
«Le pire scandale sanitaire depuis des décennies»
Le député Nicolas Thierry a quant à lui présenté sa récente proposition de loi basée sur trois axes : interdire dès 2025 la fabrication et la commercialisation des PFAS lorsqu’il existe une alternative (emballages alimentaires, mousses anti-incendie, certains textiles…) et totalement dès 2027 (hors secteurs de la santé et de la sécurité), instaurer un contrôle obligatoire des PFAS dans l’eau potable, prévoir une stratégie de dépollution des sites contaminés avec les contributions financières des entreprises responsables afin que le principe de pollueur-payeur s’applique. Il a souligné l’urgence d’agir : «Le débat est quand même enclenché depuis 20 ans aux Etats-Unis, qu’il soit public, politique et juridique, en sachant que les premières toxicités ont été constatées en 1961» ajoutant que «c’est le pire scandale sanitaire depuis des décennies».
«Protéger la santé des gens et la santé du vivant de manière globale»
Marie-Charlotte Garin a quant à elle dénoncé le manque de considération de la santé environnementale par les pouvoirs publics : «La question de la santé environnementale est un angle mort de nos politiques publiques depuis des années. On a fait passer le profit avant la prévention et on commence à en subir les conséquences. Tout ce qu’on ne paie pas aujourd’hui dans la prévention et la santé, on le paiera demain. Il ne faut pas le voir comme une dépense déraisonnée mais comme un investissement pour protéger la santé des gens et la santé du vivant de manière globale». Enfin, selon Philippe Chamaret, «la concorde n’existe pas et n’est de toute façon pas souhaitable. Il faut que le conflit perdure, que les enjeux différents voire opposés s’expriment pour faire émerger le besoin de connaissance ». Les représentantes de l’Institut du Pays du Mont-Blanc, qui bénéficie du soutien de quelques scientifiques, d’élus et de citoyens, ont présenté leurs actions et souligné «la force du collectif pour chercher ensemble des solutions» car «on dirait que tout est fait pour nous cacher la vérité alors les citoyens doivent se révolter pour faire bouger les choses». Le public a fait part de ses inquiétudes et de son besoin de comprendre. Tous en ont conclu que «pour avancer, ce sujet doit monter dans le débat public».