Henry Tracol, le cœur de l’Albanais

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«Nous autres savoyards, habitons un pays 
Merveilleux, formidable, agréable et joli… »
Son ami Bruno Lapeyronie l’avait, avec justesse, nommé «Albanais de Cœur» : le décès, cette semaine, d’Henry Tracol prive Rumilly et sa région de l’un de ses meilleurs ambassadeurs, et ses concitoyens d’un ami cher. 
Photographe, écrivain, dramaturge, cinéaste, journaliste, mais aussi comédien, conseiller municipal, responsable d’associations, etc... accompagné de son épouse Bernadette, Henry aura goûté la vie avec gourmandise durant ses 95 années de vie, malgré nombre de difficultés et de drames.    
En hommage à ce rumillien d’exception, comment ne pas évoquer une vie aussi bien remplie ?
Témoin de son siècle
Rien ne prédestinait le jeune Henry Tracol à devenir photographe. Son goût de l’aventure le poussait vers d’autres destinées. Pourtant, il deviendra, au travers de quelques 250 000 clichés, le témoin de son siècle et l’observateur de la vie de sa région. 
Lorsque le père d’Henry Tracol est arrivé à Rumilly, en décembre 1940 comme chef de gare, il avait déjà derrière lui une longue carrière militaire. Pas vraiment étonnant que le jeune Henry, dès l’âge requis, se soit engagé comme pilote, en 1944. Parti début 1945, il sera libéré en 1946, terminant ainsi une carrière aéronautique trop brève. 
 «Je n’avais pas la vocation, c’est l’aviation qui m’intéressait !». C’est sans doute le hasard qui fera de lui un observateur de son siècle. A peine libéré, il «s’embauche» chez Joanny Cloupet, le photographe de la place de la Mairie à Rumilly. Et dès le 1er janvier 1948, il reprend l’affaire de son maître d’apprentissage et s’installe dans l’atelier de photographe.
Commence alors une aventure de plus de soixante années qui fera de Henry Tracol l’une des figures les plus marquantes de la vie rumillienne. Rencontre et longue amitié avec le sculpteur Robert Ramel, création du premier Salon d’art de l’Albanais, création de la troupe «Les Gars de la Rampe», du Caméra Club de Rumilly, parmi bien d’autres activités. Sans oublier le rugby, au sein du FCSR, ou l’athlétisme, ou encore le basket.
En 1959, il entre au conseil municipal et, en 1971, il est élu adjoint au maire de Rumilly, chargé des sports, de la culture et du jumelage avec Michelstadt. Au passage, il préside quelques temps le Syndicat d’initiative… 
Photographier le monde
Tant d’énergie pour un seul homme ! Et, en même temps, il écrit… Des pièces de théâtre, des nouvelles, des romans, etc. Depuis sa jeunesse, Henry Tracol a toujours écrit, une autre façon de photographier le monde… 
En 1959, il compose sa première pièce de théâtre, «Fleur de Passenaille», puis «Esprit es-tu là ?», toutes deux jouées par les Gars de la Rampe. Et des romans «La potiche de Saint Fier», «Le soleil du crépuscule», «Aurore d’Esperland». 
Des morceaux choisis de l’œuvre d’Henry Tracol, «papiers» dans la presse locale, poèmes, extraits de pièces, etc., ont été réunis dans «Un Albanais de Cœur».
Car il est également correspondant de presse et de 1971 à 1974, il publie chaque semaine une chronique dans «L’Agriculteur Savoyard» (ancêtre de l’Hebdo des Savoie) : «Cocrair», le curieux, examine à la loupe la vie de ses contemporains… 
Il cultive une amitié sincère avec Joseph Joffo, l’auteur du «Sac de billes», rencontré en 1975 et lui-même décédé il y a moins d’une année.
En 2003, Henry Tracol a été distingué par le Ministre de la Culture au grade de Chevalier des Arts et Lettres, tandis qu’il organisait des expositions de ses innombrables photos… 
En 2006, il sera fait Citoyen d’honneur de la ville de Rumilly, après avoir publié, entre autres, plusieurs ouvrages de photographies qui témoignent de sa passion pour son Albanais («Soixante ans de photos», «18 communes en Albanais»), et plusieurs chroniques («Un photographe dans la ville», «Mon Rumilly pendant la guerre»). 
Henry Tracol aura accompagné, avec une joie de vivre communicative, son époque, et porté témoignage de toute une vie ouverte sur le monde, sur les autres.
Juste pour rester encore un peu dans son monde si riche et rendre un dernier hommage à ce personnage si attachant, quelques-uns de ses vers, tirés d’un poème qu’il adressait à ses amis disparus.
«Avec mes amis dans les étoiles
Avec mes amis, partis
Mais là pourtant, présents.
Mes amis que j’aimais tant
Dans les étoiles d’un ciel si grand…
Mes bons et vrais amis qui sont partis
Et surtout pas disparus… Ah, ça, non, jamais !»
RC

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