«Il faut rendre l’argent aux Français»

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Dès août dernier, vous annonciez haut et fort : « Si l’on continue sur ce rythme, Emmanuel Macron conduit la France dans le mur et tout cela peut très mal finir ». Pensiez-vous que le mouvement des gilets jaunes serait aussi violent ? 
«On a rarement vu un Président aussi déconnecté de la réalité des Français. Emmanuel Macron a allumé la mèche. Les gens sont en colère et il est tout à fait logique que la situation explose. Les revendications des gilets jaunes sont justes. Il est inconcevable qu’un français qui travaille gagne moins qu’un français qui reste chez lui. Mais quoiqu’il en soit, je ne peux cautionner la violence. Il faut qu’elle s’arrête ». 

Selon le 10e baromètre annuel de la confiance du centre d’étude de la vie politique, publié par «Le Figaro , jamais les Français n’ont exprimé une telle défiance envers leurs institutions et les acteurs de la vie démocratique.  Qu’est-ce-que cela vous inspire ?
«Le président de la République n’a pas compris qu’il fallait avant tout faire preuve d’exemplarité. Les Français veulent des élus qui sont connectés aux réalités au territoire. Notre pays étouffe sous le poids des impôts, des taxes, des charges. Il faut baisser les dépenses publiques, arrêter le gaspillage de l’argent public. Il faut rendre l’argent aux Français. 
Parce qu’il faut savoir appliquer à soi-même ce que l’on demande aux autres, j’ai baissé de 10% de mon salaire. 
La région a été la seule à avoir diminué les impôts. En deux ans, j’ai aussi baissé de 12 % les dépenses de fonctionnement. On a tout nettoyé, garder les services de proximité et éviter d’empiler les couches pour faciliter les obligations administratives. C’est une question de bon sens».

«Il faut arrêter de pondre des lois qui sont loin de la réalité des territoires»

Quel rôle vous donnez-vous dans le Grand Débat  lancé par le gouvernement ?
«Nous prendrons position dans ce débat mais la façon dont il commence nous préoccupe déjà. Il faut plus de discussion et laisser les Français venir nous poser leurs problèmes. Notre rôle dans ce débat est de relayer leurs voix. 
Emmanuel Macron a tendance à souvent mépriser les maires qui sont pourtant le maillon le plus proche des Français. Il faudra rester vigilant car nous craignons que certains sujets soient laissés sous le tapis comme la CSG ou encore l’appauvrissement des retraites. Il faut arrêter de prendre toutes les décisions à Paris, arrêter de «pondre» des lois qui sont loin du terrain ».

En réaction à l’éloignement d’Emmanuel Macron des préoccupations des maires, vous affirmez être le premier partenaire des communes. Concrètement, comment les aidez-vous ?
«On ne construira pas la France sans la ruralité et sans les communes. En Auvergne-Rhône-Alpes, on écoute les territoires. 1,1 Md€ d’ici 2021 sont mobilisés pour leur aménagement. 
Face au sentiment d’abandon des communes et pour compenser l’ampleur du désengagement de l’Etat qui amplifie leurs difficultés, nous avons décidé de renforcer encore l’aide de la région. 
Une aide supplémentaire de 100M€  a donc été votée en octobre dernier qui permettront à nos communes de financer leurs projets et de mieux répondre aux attentes de leurs habitants. 
Au-delà de l'engagement financier, nous avons aussi simplifié et rendu accessible l'administration aux maires et aux élus locaux (ndlr: refonte des aides, simplification du règlement des subventions, interlocuteurs directs, dématérialisation des procédures). Depuis 2016, la Région a déjà accompagné près de 3 000 projets grâce aux différents dispositifs régionaux. Deux  communes du territoire sur trois ont déjà̀ pu bénéficier d’un accompagnement.

La santé et plus particulièrement la lutte contre les déserts médicaux restent un de vos cheval de bataille.  
«Nous sommes aujourd’hui la première région de France en matière de Maisons de Santé. Nous avons doublé les aides pour les projets de création ou d’extension (200 000 € au lieu de 100 000€). Depuis 2016, 80 maisons de santé ont été construites (pour un montant total de 12,4 M€) et 28 ont été financées sur la seule année 2018. Les cabinets de télé-consultation seront soutenus. Des centres de santé intitulés Dok’ici, composés de médecins généralistes et d’un ou une infirmière, s’installeront dans des zones prioritaires. En complément de leur activité classique, ils disposeront d’un bus médicalisé qui se déplacera une à trois fois par semaine au cœur-même des territoires qui en ont besoin.

95% de nos marchés  publics ont été attribués à des entreprises régionales

Vous assumez sans détour une préférence régionale pour préserver les emplois et aider les entreprises. Concrètement, comment faites-vous ?
«Nous avons aidé 14 000 entreprises en 2017, et 18 000 en 2018. Les artisans sont le nerf de nos territoires. Nous voulons défendre nos entreprises familiales comme nous l’avons fait par exemple avec la coutellerie de Thiers ou encore une fabrique de ski made in Savoie. 
95% de nos marchés publics ont été attribués à des entreprises régionales. Nous privilégions les entreprises locales dans nos marchés tout simplement en instaurant des micro-clauses comme l’obligation d’avoir des apprentis ou encore des temps courts de réactions qui imposent une entreprise de proximité. 
On ne prend pas forcément les moins chères, mais on prend les meilleures. C’est un positionnement de priorité locale assumé qui nous permet aussi d’aider nos entreprises et d’éviter le travail détaché notamment dans le BTP.»

Autre sujet au centre de vos préoccupations, la sécurité dans les lycées mais également dans les transports. Quel budget y consacrez-vous et comment ?
«Les attentats, les agressions ou les actes de vandalisme nous ont alertés sur l’importance de sécuriser nos lycées.  Aujourd’hui, 9 lycées sur 10 ont été équipés d’un système de sécurité. 
Avec 1,5 milliard d’euros pour le Plan Marshall qui prévoit la construction/rénovation des lycées de la Région (ndlr : 4 nouveaux lycées ont vu le jour en Nord Isère, dans l’Ain, l’Est lyonnais et à Clermont-Ferrand) et 90 millions d’euros pour le plan de sécurisation des lycées, nous mettons en place les moyens nécessaires pour offrir à nos enfants le meilleur environnement possible pour leurs études. 
Nous devons la sécurité à nos habitants, y compris dans les transports.  Depuis 2016, la région a déjà équipé en vidéo-protection 76 TER et certaines gares.  Notre objectif est de sécuriser un tiers des gares ainsi que 100 % des rames TER. 
Nous avons également doublé le nombre de PV et le taux d’élucidation de délits a fortement augmenté. 
Le nombre des agents de police ferroviaire affectés à la sécurisation des TER a doublé passant de 80 à 160 agents. La gratuité à bord des trains régionaux pour les policiers nationaux et municipaux a aussi été décidée ce qui renforce la présence des forces de l’ordre et augmente la capacité de réaction en cas d’incident ou d’agression.

Vous annoncez que la région est une des mieux gérée de France. Pourtant, les budgets  2016 et plus récemment le budget 2017 ont été rétoqués par le tribunal administratif de Lyon. Une explication ?
«Comme en 2016,  cette annulation est une pure question de forme et non de fond (Ndlr : en 2016 pour «manque d’information aux élus» et  en 2017  pour «tri arbitraire des amendements»). Plutôt que de travailler ensemble, nous rentrons dans une guérilla juridique. Ce n’est pas le lieu, il faut revenir à ce qui est important».

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