La commune est-elle écolo ?

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Au point de départ, il y a une question posée en fin de conseil municipal. Une question de forme, surtout, de la part d’un conseiller de l’opposition, Jacques Morisot, qui s’indigne qu’une lettre adressée au maire et aux conseillers municipaux n’ait été connue que du seul premier magistrat de la commune. «Nous n’avons pas reçu ce courrier ! Pourquoi ?».
Mais derrière cette question de communication, le fond de l’affaire, c’est une question qui touche à la défense de l’environnement et à la position de la commune sur ce plan. Car la lettre en cause provenait d’un collectif qui fait beaucoup parler de lui en ce moment. Sous le nom de «Nous voulons des coquelicots», cette association milite pour l’abandon total des pesticides.
«Les pesticides sont des poisons qui détruisent tout ce qui est vivant. Ils sont dans l’eau de pluie, dans la rosée du matin, dans le nectar des fleurs et l’estomac des abeilles, dans le cordon ombilical des nouveau-nés, dans le nid des oiseaux, dans le lait des mères, dans les pommes et les cerises. 
Les pesticides sont une tragédie pour la santé. Ils provoquent des cancers, des maladies de Parkinson, des troubles psychomoteurs chez les enfants, des infertilités, des malformations à la naissance. L’exposition aux pesticides est sous-estimée par un système devenu fou, qui a choisi la fuite en avant. Quand un pesticide est interdit, dix autres prennent sa place. Il y en a des milliers», lancent ces militants de la cause écologique.
Dans leur lettre aux élus, ils demandaient à la municipalité de se prononcer sur ce sujet de l’interdiction totale des pesticides. D’où la question de fond posée en conseil municipal, à laquelle c’est Danièle Darbon qui, en l’absence du maire, a dû répondre.
«L’association a été reçue par Emmanuelle Lampin, chargée de mission Développement durable à la ville», a répondu la première adjointe. Celle-ci les a informés de ce que fait la ville en la matière. Et qui est en accord avec le Plan Communal de développement durable établi et adopté en 2011. 
Avec un objectif «Zéro Phyto» qui a permis de supprimer l’utilisation de tous produits phytosanitaires sur les espaces publics depuis le 1er janvier 2017. En accord avec les prescriptions de la loi du 6 février 2014, dite loi Labbé, modifiée par l’article 68 de la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015, qui interdit depuis le 1er janvier 2017 «aux  personnes publiques» d’utiliser des produits phytosanitaires pour l’entretien des espaces verts accessibles ou ouverts au public.
Par ailleurs, la commune a mis en place un plan de gestion différenciée des espaces verts qui «consiste à ne pas appliquer à tous les espaces la même intensité ni la même nature de soins […] La gestion différenciée, c’est entretenir les espaces publics autant que nécessaire en impactant aussi peu que possible les ressources naturelles environnementales».
Et, pour être juste, la commune s’engage sur de nombreux points comme la mise en place d’un rucher municipal ou la réalisation d’un espace protégé «Refuge LPO» aux Pérouses avec la Ligue de protection des oiseaux.
Travailler autrement ?
Rien à redire donc, sauf que, toujours en conformité avec la loi, les «terrains de sport» sont sortis du champ d’application de la loi. Et que l’utilisation de produits phytopharmaceutiques y est autorisée. Et même si des précautions d’usage sont imposées – en particulier un «isolement» temporaire des terrains, interdits aux sportifs et aux autres dans les heures, voire les jours qui suivent l’utilisation de ces produits – et même si l’on reste prudent en la matière, les effets sur l’environnement, les cours d’eau et les nappes phréatiques ne sont pas négligeables. Et comment entretenir un terrain de rugby et garantir une pelouse drue et régulière après le passage de trente rugbymen durant une heure et demie de match ? 
«On recherche toujours la meilleure façon de procéder», se justifient les responsables. Et on peut leur accorder le bénéfice de la sincérité.
Reste que, quand on sait la place qu’ont prise les surfaces de pelouses sportives dans le patrimoine foncier de la commune, difficile de parler vraiment de «Zéro phyto» sur l’ensemble de la ville. 
Pourtant, certains spécialistes engagent les municipalités à travailler autrement sur les terrains de sport. «Dix, vingt voire trente années d’entretien d’un terrain de sport avec des méthodes traditionnelles, ont un impact majeur sur les sols», estiment certains. «Le plus souvent, le régime phytopharmaceutique en vigueur jusqu’à la loi Labbé a détruit une grande partie des organismes vivants, a minéralisé les sols, les durcissant, les rendant compacts et imperméables». D’où un patient travail de rééquilibrage du terrain et l’utilisation de techniques «qui vont permettre d’avoir un gazon dense, vigoureux et résistant à l’arrachement afin de réduire au maximum la place laissée aux adventices et aux maladies».
«La patience est le maître mot, et on doit absolument se donner du temps. Nous  avons commencé à réduire les intrants sur nos terrains de sport bien avant l’entrée en vigueur de la loi. Grâce à cette gestion anticipée, nous sommes en zéro produit, hormis l’emploi d’engrais organiques», explique une responsable adjointe du service espaces verts de Bourg-en-Bresse. Il reste que cela nécessite un travail plus important, avec éventuellement l’obligation de re-semer à certains moments, en fin d‘hiver en particulier.
Pas facile, on le voit, de satisfaire tout le monde. Les sportifs d’un  côté qui exigent que la qualité des pelouses soit à la hauteur des excellentes performances des équipes de rugby ou de football. 
Les défenseurs de la nature de l’autre, qui refusent de voir disparaitre les espèces animales et végétales et polluer les eaux des rivières et des nappes phréatiques. Et les professionnels pour qui cela impose un surcroit de travail pour un résultat qui n’est pas forcément à la hauteur de leurs efforts.
C’est dire que le chantier est largement ouvert….    
               RC

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