La Ville s’oppose à l’installation d’une 27e agence immobilière en centre-ville
C'est une première : la Ville a choisi d'exercer son droit de préemption sur un bail commercial, rue Albert Ier, pour préserver la diversité du commerce en centre-ville, lors du conseil municipal de ce mardi 28 février. Le débat a vite dérivé sur les possibilités de préempter pour favoriser le logement social ou les trames de biodiversité.
La gérante de l'épicerie fine «Mise en scène», située au 2 rue Albert Ier, prévoyait de céder son droit au bail à une agence immobilière au prix de 72.000€. Mais la Ville s'y est opposée, considérant que ce domaine était surreprésenté en centre-ville. «On en dénombre 26», justifie Marie-Pierre Montoro-Sadoux, adjointe au commerce. Un outil légal lui permet de le faire en centre-ville, défini comme un périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat de proximité, au titre de la préservation de la diversité des commerces : le droit de préemption sur un bail commercial, que la Ville a donc choisi d'exercer pour la première fois.
Ce droit lui donne la priorité de l'acquisition sur l'agence immobilière. «Le propriétaire des murs et la commerçante ont été reçus et soutiennent notre démarche.» Ce bail sera donc acquis par la Ville au même prix avant d'être rétrocédé à un commerçant ou à un artisan dans les trois ans qui viennent. «La commune, en lien avec le service économique de Grand Lac, lui-même en lien avec les chambres consulaires, va se mettre en recherche active pour trouver un repreneur. Si on ne le trouve pas tout de suite, on pourra sous-louer ces locaux, en accord avec le propriétaire, et installer une boutique éphémère», informe Mme Montoro-Sadoux.
Ce droit n'est applicable que selon des situations et des paramètres bien précis, comme l'a souligné le maire, Renaud Beretti. «Les gens pensent que nous pouvons intervenir à chaque fois quand les enseignes nationales remplacent des commerces de proximité, mais ce n'est pas le cas.»
Quid de la préemption en faveur du logement social et de la biodiversité ?
La décision d'exercer ce droit de préemption sur ce commerce a été saluée par le conseiller municipal d'opposition de gauche, Daniel Carde, qui souhaiterait même le développement de cette initiative «pour rattraper notre retard en matière de logement social et pour privilégier la continuité écologique».
Cette remarque a donné lieu à un point d'étape sur le logement social. Le maire estime avoir «produit un effort par rapport à 2018, même si ce n'est pas parfait, en rattrapant notre retard d'un point de vue qualitatif». Un rattrapage de 40% au niveau des logements PLAI (destinés aux personnes en très grande précarité), précise l'adjoint à l'urbanisme, Nicolas Vairyo. «Nous avons aussi des orientations d'aménagement importantes. Il n'y a pas matière à plus d'interventionnisme. Je suis pour un équilibre. Au-delà de produire du logement, il faut voir comment on organise la ville avec les services associés», estime l'adjoint. Thibaut Guigue, revêtant sa casquette de vice-président de Grand Lac en charge de l'urbanisme et du logement social, ajoute que «dans le cadre du contrat de mixité sociale, les bailleurs sociaux seront les destinataires des cessions de terrains et en deviendront les acheteurs privilégiés».
Quant à exercer le droit de préemption au bénéfice de l'environnement, Thibaut Guigue explique toute la complexité d'une telle mise en oeuvre. Si l'agglomération possède un droit de préemption urbain, cette compétence relève de la Safer sur les terrains agricoles et naturels. «A Grand Lac, nous avons toutefois réussi, il y a trois ans, à calmer une petite excitation foncière au bord du canal de Savières où le prix des parcelles avait été multiplié par 40 en vue d'installer des cabanons démontables.» L'agglomération tâche quand même de préserver des trames vertes et bleues lors de l'élaboration des documents d'urbanisme. «Aujourd'hui, par exemple, nous travaillons sur une grosse étude d'urbanisme en partie financée par l'Etat à Viviers-du-Lac, sur 4 hectares agricoles, en tentant d'imaginer comment maintenir des trames de biodiversité dans le futur bâti.» Il conclura ainsi : «La commune comme l'agglomération font ce qu'elles peuvent là où la compétence existe».