Le Savoyard Erick Warin parcourt 1000m dans une eau à 2°C
Erick Warin, qui avait évoqué, dans l’édition du 20 janvier, sa participation aux Championnats du monde de nage en eau glacée en Pologne le week-end du 5 février, revient sur sa performance et livre ses impressions 3 jours après parcouru 1000 mètres à la nage dans une eau à 2°.
«J’ai passé 26 minutes dans l’eau glacée»
«Même si je n’ai pas atteint mon objectif de parcourir les 1000 mètres en 20 minutes, je suis suis heureux d’être allé jusqu’au bout. Je visais ce temps car aux derniers championnats de France à Samoëns en 2019, j’avais parcouru la distance en 22 minutes et j’espérais m’améliorer. Sauf qu’à Samoëns, la température était à 4,5°, alors qu’à Glogow elle était à 2°. C’était une inconnue pour moi, je n’avais jamais nagé dans une eau si froide. Il y avait en plus de ça beaucoup de vent, l’eau était vert-marron, il n’y avait aucune visibilité, je ne voyais pas le bout de mes doigts. Quel que soit mon résultat, je peux quand même être fier, la performance était là, j’ai passé 26 minutes dans l’eau glacée, je finis 7e mondial dans ma catégorie d’âge (55-59 ans) et 64e toutes catégories confondues sur les 150 inscrits pour les 1000 mètres. 1000 mètres, c’est la discipline la plus dure, parfois considérée comme l’ascension de l’Everest. L’année prochaine, j’aurai 60 ans et peut-être plus de chances de remporter une médaille car les participants dans cette catégorie sont moins nombreux».
«Tout se fait grâce au mental»
«Je faisais partie de la 1e série de la journée, dont le départ était à 9h. Le temps était mauvais, une alerte tempête avait même été envoyée la veille, et apparemment il y avait eu un tremblement de terre la nuit précédente. Se mettre en maillot le matin dans ces conditions, c’était un peu dur. Et d’ailleurs, la température était plus froide que pour ceux qui ont nagé l’après-midi car l’eau eau est montée à 3,5 °. A ce niveau-là, la marge est monstrueuse.
Nous étions 10, 2 Français et des Polonais. Au début de la course, j’étais en tête, mais je suis peut-être parti un peu vite car au bout de 150 mètres, j’ai commencé à perdre mes repères, j’ai zigzagué, et me suis rapidement fait dépasser. Et puis une autre difficulté m’a fait perdre du temps : les retours au mur. C’est-à-dire qu’il n’y a pas de culbute, il faut toucher et repousser, ce que font les nageurs de bassin qui reprennent de la vitesse car ils ont cette habitude que je n’ai pas de retournement et de poussée. J’ai continué pour moi et aussi pour mon «chaperon». Sur les 500 et 1000 m, on est obligé d’avoir un «chaperon», que personnellement j’appelle «ange gardien». C’est quelqu’un qui nous accompagne depuis le point de départ et qui veille sur nous tout le long de la course. Le mien, c’était Alain Simiac-Lejeune, l’un des meilleurs nageurs français en Ice Swiming. Quand il s’est aperçu que ma fréquence de mouvements de bras tombait, il a eu de grosses inquiétudes. Mes mains étaient gelées, très dures, je ne pouvais plus les bouger. Mais je n’ai rien lâché. Tout se fait grâce au mental.
Le temps limite était de 25 minutes, et ils ont validé le mien parce j’étais vraiment en fin de course durant la 26e minute».
«Après la course, une 2e course : revenir à la vie»
«Une fois la course terminée, il y a une 2e course qui arrive : revenir à la vie. Quand je suis sorti de l’eau, j’ai eu évidemment beaucoup de mal à marcher. Mon «chaperon» m’a enfilé une «Dryrobe» (long peignoir doublé avec des bouclettes à l’intérieur) puis m’a accompagné en zone de réchauffement. Normalement, il y a 3 étapes de réchauffement : le «first step», c’est une salle où l’on trouve des serviettes chaudes trempées dans une eau à 40° que l’on pose sur le corps, ce qui permet d’enlever le froid épidermique. Mais cette 1e étape n’était pas prévue en Pologne. Il restait donc 2 «steps», le sauna et le jacuzzi. Je suis entré dans le sauna et là ça a été le combat. Les médecins confirment que le temps de récupération équivaut au minimum à 2 fois le temps passé dans l’eau donc pour moi, 52 minutes se sont écoulées que je me mettre à trembler».
«On est tous là pour partager une passion»
«Il y avait vraiment une super ambiance, j’ai rencontré des gens du monde entier. On est tous là pour partager une passion, j’ai fait plein de belles rencontres, toutes les nationalités étaient ensemble, c’était vraiment fort. Et les Polonais sont un peuple extraordinaire, on a des leçons à apprendre, ils sont très accueillants. Merci à eux d’avoir maintenu la course parce que ça fait 2 ans qu’on est était en manque. Et si tout va bien, les prochains championnats du monde, en 2023, auront lieu en France, dans les Alpes».