Les souterrains pour faire la lumière…

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Même si, depuis quelques semaines, le dossier de la requalification de «l’ilot Montpelaz Tours» n’émerge plus beaucoup des éléments de l’actualité, entre vœux officiels et premiers remous de la campagne électorale, il n’est pas pour autant remisé dans les oubliettes municipales. 
Bien au contraire, pierre par pierre (si l’on peut dire !), la municipalité avance ses pions et semble bien vouloir accélérer les démarches avant la fin du mandat actuel.
Petit rappel sommaire des intentions. A partir d’un constat confirmé par une étude sur l’avenir du centre ville, qui qualifie le quartier de la rue Montpelaz-rue des Tours de «secteur qui connait une dévitalisation certaine», avec «une image dégradée», la municipalité a engagé un programme de «revitalisation» du quartier, qui passe par le développement de logements (immeubles sur la rue des Tours), la construction d’une résidence pour jeunes actifs et «des opérations exemplaires en réhabilitation/restructuration» dans la rue Montpelaz. 
Avec, entre autres, l’ouverture d’une «placette» sur les remparts. Tout cela soutenu et financé dans le cadre de l’opération «Action Cœur de Ville».
En septembre dernier, le conseil municipal a constaté, après une procédure d’appel public à la concurrence pour recruter un aménageur chargé de cette opération, l’absence de candidat. C’est donc la commune elle-même qui doit se charger de cet aménagement. Un budget de 2,7 M€ a été approuvé pour la réalisation des espaces publics et une procédure de recrutement d’un maître d’œuvre a été lancée. Tandis que les négociations ont été entamées pour acquérir les immeubles et terrains concernés par l’opération globale.
Une analyse différente
Dès le départ, suite à une concertation organisée comme le prévoit la législation, le courant a eu bien du mal à passer entre la municipalité et les habitants et propriétaires du quartier. 
Face à une équipe municipale bien décidée à faire passer son projet coûte que coûte, y compromis si nécessaire par une procédure de DUP (Déclaration d’utilité publique) et des expropriations, un collectif s’est créé pour défendre les intérêts des «locaux». 
Les «Amis des Tours» travaillent depuis plusieurs mois sur un projet alternatif qui, pour eux, permettrait de préserver ce qui doit l’être tout en engageant, avec la municipalité, une véritable réhabilitation du quartier. 
Ainsi, les propriétaires de la rue des Tours se disent «prêts à relever le défi» et proposent une analyse différente de celle du maire de Rumilly.
D’autant que, selon eux et contrairement à ce que le maire aurait déclaré, ce n’est pas 90% des propriétaires qui auraient signé un accord avec la municipalité pour céder leur bien, mais seulement deux sur les 25 propriétaires concernés. 
«Nous subissons des manœuvres d’intimidation de la part de la mairie et de l’Etablissement public foncier». Avec la menace, à peine voilée, de la démolition pure et simple de l’habitation de certains, même si le maire affirme avec force qu’il n’a pas «vocation à détruire des maisons» (Conseil municipal du 26 septembre dernier).
«Le dossier 
prend du poids»
Pour faire avancer leur dossier auprès de la population, les «Amis des Tours» ont organisé des débats citoyens, dans le mythique «Jardin des Bernardines», et participé à nombre de manifestations locales : la Balouria, la «Rumill’Yette», le festival «Rumilly en scène», le marché hebdomadaire, etc. 
Quatre à cinq cents personnes ont ainsi été rencontrées, tandis que le collectif contactait les personnalités locales et autres parlementaires.
«Le dossier prend du poids», se félicitent les membres du collectif qui se défendent d’être des réactionnaires et revendiquent une vraie place dans l’élaboration du projet. 

Leur dossier, ils l’appuient sur la notion de patrimoine. Car le quartier, parmi les plus anciens de la ville, serait construit sur un véritable réseau de caves et souterrains que, avec le soutien d’historiens (dont Christian Regat des Amis du Vieil Annecy), et de la Société française d’étude des souterrains, ils cherchent à mettre en évidence. Un travail d’identification et de recensement de ces souterrains a été entrepris, qui laisse penser qu’ils pourraient correspondre à un système de défense médiéval, et de communication, peut-être, entre les différents châteaux de la région (Bloye, Marigny, Massingy). 
«Nous cherchons à rassembler les éléments du puzzle». Pour le moment, les témoignages et observations s’accumulent dans le dossier en cours. Avec, selon les «Amis», une direction phare : préserver le patrimoine !
Pas «intégristes»
Aujourd’hui, plusieurs propriétaires sont prêts à entamer des travaux de rénovation, de leur propre chef et en utilisant les moyens proposés dans le cadre du PLUIh (Plan local d’urbanisme intercommunal avec volet habitat) engagé par la Communauté de communes. Une démarche rendue d’autant plus nécessaire que les propositions de rachat par l’Etablissement public foncier sont loin de pouvoir satisfaire ces propriétaires…
Parallèlement, le collectif a élaboré un projet alternatif pour la rue des Tours, qui envisage la construction d’une résidence intergénérationnelle d’une hauteur maximum de 9 mètres. 
Un travail conduit avec l’appui de «Villes Vivantes», une start-up qui veut «Vivifier nos villages, faire grandir nos villes»… Des contacts avec le CAUE (Conseil en architecture, urbanisme et environnement) de la Haute-Savoie sont également en cours.
Pas question, donc, de baisser les bras pour les «Amis des Tours» qui multiplient les actions «tous azimuts» pour amener la municipalité à revoir sa copie. 
Même si la pression est de plus en plus forte avec la mise en œuvre du plan «Action Cœur de Ville» qui, pour bénéficier d’un soutien financier, impose une réalisation rapide, avant 2024. 
«Le maire a perdu une bataille», annoncent-ils, «mais sans doute pas encore la guerre !». Pour le moment, tandis qu’ils multiplient les contacts, ils se tiennent prêts à lancer des recours contre le projet, y compris en mobilisant les meilleurs avocats spécialisés.

«Nous voulons développer des perspectives d’avenir, en mettant en avant nos valeurs communes, celles de la défense de l’environnement et du patrimoine. Nous n’avons rien d’activistes intégristes»…
 

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