Malgré la vaccination, les abattages de troupeaux se poursuivent

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Six veaux et sept génisses ont été euthanasiés sur la ferme de Pierre-Jean Duchêne ce mardi 5 août.

Six veaux et sept génisses ont été euthanasiés sur la ferme de Pierre-Jean Duchêne ce mardi 5 août. - Photo : Alexis Fernandez 

Depuis plus d'un mois maintenant, la dermatose nodulaire contagieuse a frappé la Savoie et la Haute-Savoie. Malgré la vaccination, le nombre de foyers de la maladie augmente et a dépassé les 60 ce mardi 5 août. Depuis la découverte de la maladie le 29 juin, plusieurs mesures et actions ont été mises en place pour lutter contre la maladie et sa propagation dont l'abattage total du troupeau puis la vaccination (alors que les vaccins ont été reçus le 18 juillet en Savoie).

Mais alors que la majorité des vaches en Haute-Savoie et en Savoie ont été vaccinées, les abattages se poursuivent laissant toujours plus d'éleveurs dans des situations difficiles. Les fermes déjà durement touchées sont devenues silencieuses après l'abattage total qu'elles ont subies. Après les nombreuses euthanasies, les vétérinaires laissent des bâtiments et des pâtures vides et tristes au même titre que les éleveurs qui y élevaient leurs vaches tranquillement il y a un peu plus d'un mois. Pour certains, le sort s'acharne alors qu'ils avaient déjà été victimes de la maladie. 

Les abattages n'en finissent pas à Entrelacs 

C'est pas exemple le cas de Pierre-Jean Duchêne qui après avoir perdu ses vaches laitières, a dû affronter l'euthanasie de 6 veaux et 7 génisses ce mardi 5 août. Ces animaux n'avaient pas eu de contacts avec les vaches précédemment euthanasiées et n'ont d'ailleurs pas eu de symptômes ou été testés positifs à la maladie. Les veaux retranchés dans un bâtiment ne sont d'ailleurs jamais sortis alors qu'aucun cas n'a été détecté dans ce bâtiment. "Les petits veaux ont toujours été dans le bâtiment donc ils n'ont pas pu être contaminés. Un vétérinaire a d'ailleurs confirmé qu'ils ne présentaient pas de signe de la maladie", explique Pierre Jean Duchêne.

Une nouvelle triste nouvelle pour le jeune homme de 28 ans qui a néanmoins laissé faire les services de l'Etat et la DDPP accompagnés des forces de l'ordre. Désormais sous la menace d'une amende et d'une peine de prison pour avoir empêcher l'abattage de ses vaches, il ne souhaite pas prendre plus de risques judicaires. Des personnes se sont rendus sur les lieux durant l'abattage pour soutenir l'éleveur et vérifier que les choses étaient faites dans les règles de l'art lors de l'euthanasie. Certains ne décoléraient pas face aux forces de l'ordre. "On laisse crever les gens. Comment on peut faire un boulot pareil ?"

Des échanges tendus ont eu lieu avec Thierry Pothet, le directeur départemental DDPP qualifié de "lâche". Des membres de la coordination rurale étaient également là pour encadrer les échanges et empêcher la situation de s'envenimer malgré des désaccords avec les mesures de l'Etat. 

Des mesures qui ne changent pas

Ils regrettent le manque d'évolution des mesures depuis le début de la crise. "La dermatose nodulaire contagieuse est là depuis plus d'un mois, les vaches sont vaccinées et les mesures n'évoluent pas. Pourquoi ne pas procéder à un abattage ciblé ?", questionne Jérémy Béchet Barbat, co-président de la coordination rurale. Une situation d'autant plus difficile à comprendre que la Suisse procède à des abattages ciblés sur les bêtes malades et plus sur tout le cheptel. Du côté des deux Savoie, le bilan s'alourdit. "Rien qu'autour d'Entrelacs, on arrive à 1000 animaux tués", comptabilise une éleveuse.

Des données saisissantes alors que ce mardi 5 août, Pierre Jean Duchêne, Claude Germain et d'autres éleveurs étaient une nouvelle fois confrontés à des abattages difficiles à encaisser. "On arrive bientôt à la fin de la vaccination, on ne comprend plus cet acharnement à vouloir tout leur enlever", déplore Christian Convers, le secrétaire général de la coordination rurale. Des mesures de dépeuplements d'autant plus incompréhensibles pour les éleveurs qu'aucun prélèvement n'a été réalisé en amont. Des éleveurs voisins ont rendu service aux vétérinaires pour faciliter le travail et s'assurer que les animaux étaient traités correctement jusqu'à leur dernier souffle.

Une mort sans souffrance dont certaines vaches n'auraient pas bénéficier. Difficiles d'accès, près du col du Sapenay, certaines vaches seraient mortes depuis plusieurs jours et pas ramassées par les services de l'Etat. "Ils les ont laissées crever et elles sont certainement en train de pourrir", regrette un éleveur. Désormais tous attendent que les 21 jours permettant l'efficacité du vaccin soient terminés en espérant que les éleveurs puissent enfin commencer une période de reconstruction après le vide sanitaire de 45 jours. 

Mais pour cela, il faudra également attendre les indemnisations ce qui représente également une source d'inquiétude. "Ils ont estimé les vaches mais ils ont intérêt de les payer", annonce Christian Convers. Plusieurs collectivités ont fait des annonces d'aides pour les éleveurs touchés.

Une aide qui ne sera pas forcément déterminante selon Christian Convers. "Une vache, ça coûte plus de 3000 euros. 1000 euros c'est le prix d'un veau donc si un éleveur a perdu 100 vaches, il a perdu 300 000 euros. Il faut de véritables indemnisations mais c'est quasiment impayable ce qu'ils font là (les abattages des troupeaux orchestrés par l'Etat)", s'inquiète Christian Convers. Si les prochains jours et les prochaines semaines devraient apporter des réponses sur le sujet, les éleveurs n'en ont pour l'heure pas vu la couleur. 

Des vaches continuent d'être euthanasiées malgré le vaccin. - Photo : Alexis Fernandez 
Des vaches continuent d'être euthanasiées malgré le vaccin. - Photo : Alexis Fernandez 
Un dispositif d'une quinzaine de gendarmes a encadré l'euthanasie des génisses et des veaux sur la ferme de Pierre-Jean Duchêne. - Photo : Alexis Fernandez 
Un dispositif d'une quinzaine de gendarmes a encadré l'euthanasie des génisses et des veaux sur la ferme de Pierre-Jean Duchêne. - Photo : Alexis Fernandez 
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