Masque de tendresse…
Personne n’est parfait ! J’ai parfois des comportements de midinette, et je n’en ai aucun complexe.
Par exemple, régulièrement, avec ma fille, on se fait des après-midis télé. Avachies sur le canapé, on se regarde des séries totalement nunuches où des Brandon séduisent des Brittany, où Kevin tombe raide dingue d’Ashley. Vous voyez le genre…
Ouais ! Je vous entends déjà ! Vous vous dites que, décidément, mon niveau intellectuel ne casse pas des briques ! Franchement, je ne vois pas le problème. Ce n’est pas pire que de passer des heures une canette de bière dans la main à regarder une vingtaine de types en train de courir après un ballon.
Bon, je ne suis pas là pour défendre les « soap opéras » face aux directs de la ligue des champions (je crois que ça existe !). C’est juste pour planter le décor.
L’autre jour, c’était une série pour ados. Et sur l’écran, un garçon (15 ou 16 ans) embrassait timidement, et délicieusement, sa copine à laquelle il venait de déclarer un amour éternel. Ma fille, 14 ans aux châtaignes, totalement subjuguée, évidemment. Sans doute en train de s’identifier…
Et brusquement, elle me demande : « Maman, tu crois que, un jour, je pourrai embrasser, moi aussi, mon amoureux quand j’en aurai un. Je veux dire l’embrasser sur la bouche, et sans masque ! ». Ouah ! Ma fille ! Tu as parfois des questions que j’aimerais mieux ne pas entendre ! Qu’est-ce que je peux répondre ?
Evidemment, j’ai eu un discours rassurant, en lui assurant que, bientôt, le masque serait redevenu un accessoire réservé aux chirurgiens. Je ne suis pas sûre de l’avoir convaincue. Et depuis, je me sens plutôt mal à l’aise.
D’autant que le cadeau que l’on vient d’offrir à la génération de ma gamine, ce virus redouté dans le monde entier, n’est pas seul. Le spectre du SIDA plane aussi au-dessus de sa tête, même si les jeunes ont appris à vivre avec. Et je ne parle pas de la façon dont ma génération a su sacrifier la santé de la Terre et des terriens à un confort trop facile.
Alors, le masque ? Je ne sais pas comment nos enfants sortiront de cette crise. Cette semaine, un lecteur m’a envoyé une lettre que j’ai beaucoup aimée. Sans tout vous révéler de son contenu, je veux juste évoquer un passage où D. (je ne suis pas certaine qu’il aimerait que je dévoile son nom !) parle de « la perte du sourire, la pire des choses qui nous est imposée car il disparait derrière cet accessoire [le masque] ».
La perte du sourire ! Evidemment, il reste le regard. Et certains savent nous sourire par-dessus ce bout de tissu ou de papier. Mais on ne sait jamais si, nous-mêmes, on a pu rendre cette ébauche de sourire. Et que dire du baiser des adolescents…
Plus que jamais, nous avons besoin de tendresse. Je reste persuadée que le masque est indispensable aujourd’hui, même si je suis un peu troublée par cet esprit de propagande anxiogène que distillent les médias. Mais par-delà cet accessoire nouveau pour nous, il nous faut trouver de quoi transmettre cette tendresse à ceux qui nous sont chers.
Voilà ! Ce sont juste des réflexions que les réalisateurs de ce feuilleton télé un peu idiot n’avaient sans doute pas imaginé provoquer.
Et j’emprunte encore un peu à mon lecteur à la plume si délicate : « Je voudrais que la peur recule et nous laisse respirer ».
Lady Marianne
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