Où on en est des Perfluorés ?
Depuis plusieurs mois, l’emploi de mots combinés ensemble, tels que « pollution aux perfluorés » interroge le grand public et on s’y perd entre discours alarmistes, témoignages, enquêtes, etc… Retour en arrière et quelques rappels, bons à savoir sur ce sujet.
Qu’est-ce que les PFAS ? (Perfluorés)
Les composés perfluoroalkylés et polyfluoroalkylés (PFAS) représentent près de 4 000 composés chimiques synthétiques. Ils sont utilisés depuis les années 1950 pour leurs propriétés antiadhésives, résistantes aux fortes chaleurs et imperméabilisantes. Ils sont présents dans des applications industrielles et dans des produits de consommation : textiles, emballages alimentaires, poêles, mousses anti-incendie, revêtements antiadhésifs, etc.
Les PFAS se dégradent très peu, c’est pourquoi il est possible d’en retrouver trace dans l’environnement, y compris des substances qui ont été interdites depuis plusieurs années. Du fait de l’utilisation variée de ces composés chimiques et de leur persistance, tous les milieux peuvent être concernés : l’eau, l’air, les sols, et la chaîne alimentaire. Parmi les PFAS, deux sont plus connus, surtout par leur persistance dans l’environnement, le PFOA (acide perfluorooctanoïque) et le PFOS (sulfonate de perfluorooctane). Ils font l’objet de réglementations particulières (ci-après).
Toute la population est exposée, à des niveaux variables.
La principale source d’exposition est l’alimentation, en particulier :
- la consommation de produits de la mer, de viande, de fruits, d’oeufs,
- la consommation d’eau de boisson.
Les PFAS peuvent présenter, comme beaucoup de substances chimiques même simples, un risque pour la santé. Il s’agit généralement de risques chroniques, c’est à dire liés à une exposition répétée et à long terme.
Les dernières connaissances disponibles (synthétisées dans le rapport de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) de juillet 2020) indiquent un lien établi entre l’exposition aux PFAS et les effets suivants sur la santé :
- effet sur le système immunitaire chez les enfants (moins bonne réponse aux vaccins) mais sans qu’il soit possible de dire si l’exposition
augmente la fréquence des maladies ;
- petite diminution du poids à la naissance ;
- taux élevés de cholestérol ;
- perturbation du fonctionnement du foie.
D’autres effets ont été mis en évidence par des études toxicologiques sur l’animal mais n’ont pas été prouvés chez l’homme, comme des perturbations de l’équilibre endocriniens (hypothyroïdie), des effets sur la reproduction (réduction des chances de grossesse), une augmentation du risque de cancer (cancers du rein ou des testicules).
En raison d’un risque possible, en application du principe de précaution, l’un des PFAS, le PFOA, est classé par le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer) dans le groupe 2B des «substances peut-être cancérogènes pour l’homme».
Dans l’eau de consommation (eau du robinet), les PFAS ne sont actuellement pas recherchés dans le cadre du contrôle sanitaire car ces substances n’y sont pas encore réglementées.
La directive européenne de 2020 relative à l’eau potable prévoit toutefois que 20 molécules perfluorées dont quatre molécules particulièrement préoccupantes (PFOA, PFNA, PFHxS et PFOS), soient intégrés aux paramètres du contrôle sanitaire au plus tard à l’horizon 2026 et fixe une limite de qualité à 100 ng/L pour la somme de ces 20 molécules.
A noter également que l’ANSES, dans son rapport en date du 21 décembre 2017, fixe une valeur sanitaire maximale (valeur en deçà de laquelle aucun effet sanitaireindésirable n’est attendue), pour l’eau potable, à 75 ng/L pour le PFOA.
Focus sur la situation à Rumilly
Le secteur de Rumilly (Haute Savoie) fait l'objet d'une surveillance particulière en matière de pollution aux perfluorés (PFAS).
Tirant des enseignements des concentrations de substances PFAS relevées dans le secteur de Pierre-Bénite dans le Rhône, les services de l’État ont engagé une action régionale au printemps 2022 pour identifier d’autres zones potentiellement concernées. L’inspection des installations classées a recherché les établissements industriels susceptibles d’être à l’origine de pollutions, parce qu’ils utilisent encore ces substances dans leurs process de fabrication, ou parce que des PFAS ont été utilisés par le passé.
Par ailleurs, les mesures réalisées à titre expérimental dans les milieux aquatiques du bassin Rhône-Méditerranée ont été exploitées et ont permis d’identifier des points de vigilance. A l’automne 2022, les résultats des analyses sur le secteur de Rumilly en Haute-Savoie ont conclu à ce que ce secteur fasse l’objet d’une vigilance particulière.
La pollution est d'origine multiple et en partie historique. Les 5 principaux sites potentiellement à l'origine sont :
- le site industriel Tefal, en fonctionnement
- l'ex usine de fabrication de skis Salomon, arrêtée depuis 2009
- l'ancienne tannerie Fortier-Beaulieu, arrêtée depuis 2015, en reconversion
- deux anciennes décharges (secteur Broise, secteur Rizière)
Tous les captages d'eau potable dans lesquels les teneurs en PFAS étaient supérieures à la valeur réglementaire ont été déconnectés. Il s'agissait de captages publics (puits de Madrid et de Broise) et privés (entreprise CPF-Nestlé).
Actuellement, la solution mise en place est une interconnexion avec le territoire du Grand Annecy. Des mesures de plus long terme sont à l'étude par la collectivité et les services de l'Etat.
Les analyses de novembre 2022 confirment que l'eau desservie sur Rumilly répond aux exigences sanitaires.