Paraplégiques, mais rois du badminton
Thomas Jakobs (Rumilly) et Stephen Durand (Annecy) ont été meurtris dans leur chair à un âge où ils croquaient la vie à pleine dents. Victime d’un accident de voiture à 23 ans pour l’un, d’une mauvaise chute en escalade à 19 ans pour le second, les voici désormais cloués dans un fauteuil.
Compression de la moelle épinière ou série de vertèbres explosées, la sentence a été brutale, les membres inférieurs ne répondaient plus. D’aucuns se seraient morfondus mais pas eux. «J’estime que j’ai bien vécu et bien baroudé jusqu’à cet accident pour ne rien regretter aujourd’hui» confiait Stephen pour qui la vie continue, mais forcément autrement. Tous les deux, ils ont bénéficié d’un entourage familial et d’amis exceptionnels pour passer le cap de la déprime et rebondir dans la vie qu’ils croquent à nouveau à pleines dents.
Aujourd’hui, ils sont tout bonnement champions de France de badminton en double depuis le mois de janvier. C’était à Orléans. Ils se sont découverts la même passion pour le volant et la raquette et s’entraînent quotidiennement ensemble. Thomas Jakobs a même intégré le groupe France avec l’objectif de participer aux prochains Jeux Olympiques à Tokyo en 2020.
Seulement deux années de pratique du badminton pour le Rumillien et il titille déjà le haut niveau. Tous les deux licenciés à l’ABC (Annecy badminton Club), ils se retrouvent aussi fréquemment à la salle de squash et badminton de Rumilly où nous les avons rencontrés, le sourire aux lèvres.
Oui, ils sont bien dans leur peau et dans la tête et assument pleinement leur handicap. Thomas Jakobs est ingénieur à son compte, Stephen Durand avec un bac pro paysagiste en poche est sans boulot mais ne désespère pas. Mais il dispose d’un diplôme d’animateur de badminton et il entraîne des jeunes valides de 6 à 10 ans.
Le badminton, ils l’ont découvert et ne le lâchent plus. Ils ont progressé très vite dans la discipline et s’y investissent pleinement et même pécuniairement « Un fauteuil c’est 6 à 7 000 €, la sécu ne participant qu’à hauteur de 500 €, on a dû forcément mettre au bout. Les charges de déplacement pour les compétitions, les nuitées, les volants qu’il faut fréquemment renouvelés sont également des frais supplémentaires. Mais pratiquer un sport de haut niveau que l’on soit valide ou en fauteuil, c’est toujours un coût. La passion l’emporte » soulignait Thomas Jakobs qui ajoutait que «Le regard sur soi-même est très important. Le sport permet de ne pas se limiter au handicap. Le sport nous permet d’être égal aux valides, on a les mêmes rêves et des objectifs élevés»
Iront-ils aux J.O de Tokyo tous les deux en double ?
Le Rumillien Thomas Jakobs est dans le groupe France, mais l’Annecien Stephen Durand est pour le moment barré en équipe de France par la présence du Tarbais David Toupe préféré pour les stages à venir. Pas moins de 14 tournois sont au programme avant les JO : en Turquie (26 au 31 mars), à Dubaï (1er au 7avril), en Uganda (23 au 28 avril), Canada (6 au 12 mai), Irlande (17 au 23 juin), les championnats du monde à Bâle en Suisse (20 au 25 août), Thaïlande (16 au 22 septembre), Chine (23 au 29 septembre), Danemark (15 au 20 octobre), Australie (19 au 24 novembre), Brésil (10 au 16 février 2020), Pérou (18 au 23 février 2020) et enfin en Espagne (2 au 6 mars). Un quasi tour du monde que Thomas Jakobs s’apprête à vivre. La Fédération Française de Badminton ne payant que 80% des billets d’avions, le Rumillien espère que son projet de Jeux Olympiques intéressera de nouveaux sponsors. En échange, il propose de participer à la promotion et à la diffusion de l’image de marque des entreprises via les réseaux sociaux et ses tenues sportives et équipements. Thomas Jakobs promet d’être un excellent ambassadeur à l’étranger. Il remercie ses fidèles partenaires que sont les établissements Chabert, Prolutech, les Crèches Babyboom et Bubble Bar.