Récit d’une liberté retrouvée il y a 76 ans

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Chaque année, la municipalité commémore la Libération de la ville survenue le 21 août 1944 en présence des autorités civiles et militaires, porte-drapeaux, un piquet d'honneur du 13e Bataillon de chasseurs alpins et des Aixois fidèles à ce rendez-vous, attachés à l'histoire de la cité thermale et souhaitant se replonger dans cet événement marquant qui mettait fin une bonne fois pour toute à l'occupation allemande durant la Seconde guerre mondiale. L'Aixois Aimé Pétraz avait oeuvré clandestinement dès ses 16 ans (en 1941) en diffusant des tracts et journaux et avait par la suite pris les armes, participant le 10 juin 1944 aux combats du Revard et de La Féclaz avant de prendre part à peine deux mois plus tard à la Libération d'Aix-les-Bains. Disparu en 2014, il était titulaire de la Croix de Guerre avec étoile de bronze. Il aura laissé de nombreux témoignages des actes de résistance réalisés sur le territoire, que l'on retrouve par exemple à la Fondation de la résistance, au sein du département AERI (Association pour des études sur la résistance intérieure).
Les prémices de la victoire
C'est au cours du mois de juillet 1944 que les actions des résistants s'étaient intensifiés. Les Groupes Francs (GF) "Yvon", du Viviers du Lac commandé par Yvon L'Hoste ou "Michel", en Chautagne, dirigé par Martin Mouhica, menaient à cette époque de nombreux sabotages sur la voie ferrée Culoz - Chambéry. La compagnie des Francs-Tireurs et Partisans (FTP) 92.03 de Savoie de Lucien Péguet, "Bouvreuil" intervenait de Billième à Serrières-en-Chautagne. La section de l'Armée secrète (AS) de Robert Gachet, "Bollon", se trouvait quant à elle dans les faubourgs d'Aix-les-Bains. Les sabotages se multipliaient durant la première quinzaine d'août, tout comme la destruction des transformateurs et des installations de la Société Savoisienne de constructions électriques (SSCE) ainsi que des coupures de routes, de voies ferrées et de câbles téléphoniques et télégraphiques France-Italie. La récupération de matériels et de vivres permettait aux résistants de soutenir un combat plus intense. 
Le 10 août, Louis Fourcade, qui appartenait au GF "Yvon" était abattu par les Allemands à Aix-les-Bains. Le 15 août coïncidait avec le débarquement allié en Provence et quatre jours plus tard, le département de la Haute-Savoie était totalement libéré. Le même jour, d'importants responsables de la Résistance tenaient conseil dans une école de garçons de Rumilly. Le capitaine Jean Casalta, "Mollard", le lieutenant Roger Perriod, "Vanel" et René Martin, "Lepic" y assistaient. Ensemble, ils élaboraient la stratégie et la libération d'Aix-les-Bains fixée au 21 août. Les Forces françaises de l'intérieur (FFI) de Haute-Savoie sous les ordres du commandant Jean se joignaient alors aux éléments du 1er bataillon de l'AS de Savoie, commandé par les capitaines Jean Casalta et Georges Héritier, "Blanchard". Au cours de la journée du 20 août, le dispositif se mettait logiquement en place. Le poste de commandement était installé à l'hôtel du soleil couchant. Au nord, à Mémard, les groupes chautagnards "Michel" et Couverclaz épaulés par les sédentaires de Brison-Saint-Innocent, sous les ordres de Camille Lillaz, "Daniel" prenaient position. À Saint-Simond, les FFI hauts-savoyards avec des éléments FTP tenaient le boulevard des Anglais. À Mouxy, des sédentaires FTP occupaient la commune. À Marlioz, au sud, se trouvait la section de l'AS de Robert Gachet et plus loin, au Viviers-du-Lac, les GF "Yvon" et "Lavorel" de Charles Lissner avaient rassemblé leurs forces. Enfin à l'ouest, aux Quatres Chemins, une partie de la compagnie FTP 92.03 venait d'arriver de Billième. Cette dernière formation perdait malheureusement le lieutenant Jean Pianelli, arrêté au carrefour de la "Bognetta", torturé et assassiné par les Allemands. Ces derniers étaient toutefois pris au piège. Des tracts les invitaient à se rendre. Une tentative de sortie échouait même pour eux au Viviers puis aux Quatre Chemins. 

Reddition proclamée 
par le colonel Kiesel

La nuit du 20 au 21 août se passait sans incident majeur. L'État-Major FFI, sans nouvelles du commandement allemand sur ses intentions, lui lançait un premier appel à la négociation. 
Une attaque était néanmoins en préparation pour l'après-midi. Les Allemands semblaient vouloir défendre la ville en installant des nids de mitrailleuses à plusieurs points stratégiques. Les rues se vidaient et les commerçants fermaient leurs magasins. L'attaque des résistants se produisait vers 15 heures. Deux heures plus tard et malgré une résistance farouche, l'opposition allemande fléchissait. Des pourparlers s'engageaient à l'Hôpital, en présence du maire, entre les chef FFI et le colonel Kiesel aidé d'un aumônier-prêtre. Il ne repoussait pas l'éventualité d'une capitulation mais sollicitait préalablement une trêve afin d'évacuer les "grands blessés". Ayant obtenu satisfaction après une longue discussion, il demandait ensuite par deux fois, à 21h30 et à 22h30, le prolongement de cette suspension d'armes. Peu avant cette dernière échéance, une patrouille de résistants signalait le départ effectif d'un convoi formé dans le haut de la ville. Composé de voitures, de camions et d'ambulances marqués de la Croix-Rouge, il se dirigeait vers le Viviers-du-Lac par l'avenue de Marlioz. En réalité, 400 à 500 soldats allemands, bien valides, avaient embarqué dans les véhicules et dupé tout le monde. Ils ne réussissaient heureusement pas à forcer le premier barrage mais parvenaient à bousculer, aux Quatres Chemins, les éléments de la Compagnie FTP 92.03, insuffisamment armés et nombreux pour repousser un tel assaut. Le convoi se dirigeait in fine vers Chambéry. Après ce départ, le colonel Kiesel proclamait la reddition sans condition de la garnison du centre sanitaire. Il était 23h45. 177 soldats en convalescence ainsi que trois médecins et 18 infirmières étaient capturés au Grand Hôtel d'Aix-les-Bains. Au total, près de 1 350 Allemands étaient faits prisonniers. En outre, une grande quantité d'armes et de munitions tombait entre les mains des résistants. Le Comité Local de Libération (CLL) autour de son président, Francis Michelon, prenait possession de l'Hôtel de Ville. Malgré un certain engouement de la foule, la fête était de courte durée car une rumeur annonçait un retour possible des occupants. Dans la nuit, les forces FFI se positionnaient de ce fait à différents carrefours. Mais, la menace ne voyait pas le jour et le lendemain, 22 août, les unités résistantes défilaient dans les rues d'Aix-les-Bains enfin libérée. 

 

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