Sècheresse : «Chacun doit agir à son niveau, réfléchir avant d’ouvrir un robinet quel qu’il soit»
A l’heure où de nombreux départements français traversent une sècheresse hivernale, les nappes phréatiques et les cours d’eau du territoire de l’Albanais ont atteint un niveau historiquement bas. Cette sècheresse inédite alerte à la fois les élus, les pêcheurs et divers acteurs de la gestion de ressource en eau et des milieux aquatiques. Après l’épisode critique de l’été 2022, qui avait contraint la Communauté de Communes Rumilly Terre de Savoie à organiser des rotations quotidiennes de camions citernes pour le ravitaillement du réservoir de Verlioz à Vallières-sur-Fier (alimentant plusieurs communes), le faible enneigement sur le massif des Bauges et les rares pluies ces dernières semaines n’ont pas permis de recharger les nappes phréatiques. La situation est donc préoccupante et s’annonce alarmante pour le printemps, car le remplissage des nappes se fait grâce aux précipitations hivernales. Les pluies à venir ne suffiront pas : l’eau qui tombe au printemps est absorbée par la végétation.
«On a trop prélevé par rapport à ce que le milieu produit»
Après l’annonce de son arrêté-cadre sècheresse en mai 2022, élaboré avec l’ensemble des parties prenantes des divers usages de l’eau et de leur surveillance en Haute-Savoie, la Préfecture avait placé durant l’été le bassin versant du Chéran (auquel sont rattachées une vingtaine de communes) en «alerte renforcée» puis en «crise». Les cours d’eau et l’humidité des sols étaient à des niveaux critiques, en avance d’un à deux mois par rapport à la moyenne habituelle. Malgré un épisode pluvieux à l’automne, la situation semble à ce jour préoccupante et l’état actuel de «vigilance» est jugé insuffisant par les AAPPMA l'Albanais et du Haut Chéran (association agréée de pêche et de protection des milieux aquatiques). Ces dernières ont sollicité les services de l’Etat le 2 mars, demandant la mise en œuvre de restrictions sur les usages de l'eau, au regard de la situation du Chéran et de ses affluents : «Le débit du Chéran est passé aujourd'hui sous la barre des 2m³/s, débit historiquement bas pour la saison, quand on sait que son débit moyen pour le mois de mars est de 11m³/s. Nous observons d'ores et déjà un développement algal important, signe d'une eutrophisation galopante, la rivière n'arrivant plus à jouer son rôle d'autoépuration des effluents de station d’épuration !». Pascal Grillet, président de l’AAPPMA du Haut Chéran et secrétaire de l’AAPPMA de l’Albanais, précise que selon le débit de référence sur l’arrêté-cadre, le bassin du Chéran aurait dû être, début mars, au niveau d’alerte renforcée. Il ajoute que d’après le diagnostic de l’étude des volumes prélevables pilotée par le SMIAC (Syndicat mixte interdépartemental d'aménagement du Chéran), «il y a un véritable déficit, entre l’alimentation en eau potable, l’agriculture, l’industrie et les pertes réseaux. On a trop prélevé par rapport à ce que le milieu produit». Sur certaines sources, il faudrait réduire les prélèvements de 40 à 60% pour respecter les débits minimum biologiques.
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L’eutrophisation, développement algal important, menace la vie piscicole.
«Eviter des conséquences graves dans les mois à venir»
Du côté de la Communauté de Communes Rumilly Terre de Savoie, Jean-Pierre Lacombe, vice-président en charge de l’eau et l’assainissement, se dit lui aussi très inquiet et appelle à la prise de conscience générale face au besoin de restriction de la consommation d’eau : «Chacun doit agir à son niveau, réfléchir avant d’ouvrir un robinet quel qu’il soit. Nous envisageons la mise en place d’un arrêté localement».
Les écologistes du département (EELV 74), via leur porte-parole Pascal Sciabbarrasi, ont quant à eux fait part de l’urgence d’anticiper face à une telle situation afin de ne pas l’aggraver, appelant le préfet et les maires de Haute-Savoie à «agir sans attendre, et prendre les mesures de restriction d’eau nécessaires sur les usages non indispensables, afin d'éviter des conséquences graves dans les mois à venir».
