Spectacles : le «flou artistique» pour les intermittents
«Première nécessité ! ». Sans doute pour nombre d’entre nous, la culture, les loisirs, les spectacles ne font-ils pas partie des priorités. Ce qui reste à prouver… Mais pour les artistes, quels qu’ils soient, la situation est, pour le moins, problématique. Et surtout pour les « petits » artistes, ceux qui, de cachet en cachet, vivotent difficilement avec la hantise de perdre leur statut d’intermittent.
Car depuis deux mois, tous les spectacles ont été annulés ou reportés. Et si nombre de chanteurs et chanteuses, comédiens et comédiennes, danseuses et danseurs communiquent avec leur public potentiel sur les réseaux sociaux, les moyens de subsistance restent plus ou moins hypothétiques pour tous.
Ni tournées, ni festivals
La semaine dernière, Franck Riester, le ministre de la Culture, a envisagé des aides spécifiques dont, pour le moment, on ne sait pas grand-chose. Mais dans un monde où ni chômage partiel, ni télétravail ne sont possibles, et malgré le gel de la période ouvrant les droits à l’intermittence, l’avenir est particulièrement incertain pour les artistes. Et, même autour de nous, l’annulation de tous les rendez-vous – thés dansants, mariages, manifestations, festivals, etc. – laisse en particulier les musiciens sur le carreau.
Et que dire de nos voisins helvétiques pour qui le système d’intermittence n’existe pas pour les musiciens ! D’un côté comme de l’autre de la frontière, plus d’échanges, plus de rencontres.
Ainsi en est-il, par exemple, de Blandine Robin, dont le spectacle de berceuses, le « Tout Doux » devait faire partie du Festival « Petit Patapon » en mars sur la Haute-Savoie. Une première en France pour cette artiste qui, en Suisse, « tourne » de plus en plus auprès des tout-petits, et qui espérait ainsi une approche du public haut-savoyard. Pour elle, évidemment, tous les contrats – pour un spectacle qui touche les tout jeunes enfants – ont été reportés.
Et c’est ce report qui, d’ailleurs, pose problème. Car, une fois la crise passée (ce que chacun espère, quand même !), comment à la fois « rattraper » les spectacles qu’il a fallu annuler ? Les reporter c’est mettre en danger la saison suivante qui, la plupart du temps, s’élabore en ce moment. Pour beaucoup d’artistes, mieux vaudrai annuler complètement afin que des indemnités puissent compenser en partie le manque de revenus.
Il faudra sans doute plusieurs semaines pour débrouiller cet écheveau de complications… Mais pour certains qui n’ont pour seule activité que la pratique de leur art, sans prise en charge, les fins de mois risquent d’être difficiles. D’autant qu’ils ne rentrent dans aucune « case » des dispositifs d’aide.
Alors, on répète ?
Alors, ils pourraient profiter de cette période d’inactivité pour préparer l’avenir. Certes, et Blandine, par exemple, travaille à deux ou trois projets artistiques pour les mois à venir. Mais sur le papier seulement, et avec son piano et sa guitare. Parce que pour les répétitions… Il faut se contenter de ce que les technologies de la communication proposent. « C’est déjà ça, mais c’est bien insuffisant. Surtout quand on ne dispose pas d’un matériel performant ! ». Et plus le groupe concerné est nombreux, plus la difficulté est grande. Les comédiens de théâtre, en particulier, ne peuvent pas se rassembler…
Sans doute, alors que le personnel hospitalier est en première ligne dans la lutte contre le virus, le sort des artistes n’entre-t-il pas dans les préoccupations prioritaires. Et l’urgence est, bien entendu au soutien à ces professions qui s’exposent avec beaucoup d’abnégation. Il reste que notre vie, et ce sera important une fois le calme revenu, est faite, aussi, de ce que les artistes nous offrent. Les vidéos de « concerts » en chambre ou de « symphonies confinées », les poésies offertes, les danses en intérieur, etc. se multiplient sur les réseaux, ce qui prouve que le monde de la culture n’est pas affaibli par le virus.
Et on aura sans doute bien besoin d’eux quand tout cela sera fini !