Un début de mandat inédit pour Christian Heison
Après un entre deux tours plus ont qu’à l’accoutumée, Christian Heison a remporté la mairie de Rumilly en juin dernier. C’est donc au milieu d’une pandémie mondiale qu’il est devenu le premier édile de la ville, devant gérer à la fois changement de gouvernance et gestion de crise. Il revient pour nos lecteurs sur ces six premiers mois bien particulier et sur ce qu’il compte mettre en place en 2021.
Que retenez-vous de ces six mois de mandat ?
En six mois, dans la vie politique, en général rien ne se passe comme prévu. Et là, c'est une aventure que tous les élus en place depuis cet été vivent sans avoir aucune référence. On est en plein dans cette crise et on a l'impression que l'échéance se repousse et même qu'on est de plus en plus touchés en fonction des vagues. Sur Rumilly, pendant la première vague, le virus était loin de nous alors que la deuxième vague, on est en plein dedans. Aujourd'hui, il n'y a pas une famille qui a été épargnée par le covid.
Le matin, on se lève : covid. À midi on a forcément des choses à faire liées au covid et le soir on se couche en y pensant. Ça prend beaucoup de temps mais il ne faut pas qu'on fasse que ça non plus. Ça va durer un certain temps donc il faut qu'on se prépare aux lendemains tout en gérant le quotidien. Par exemple le centre de test, c'est une action qui n'était prévue dans aucun programme.
Avec le côté sanitaire, il y a le côté économique. On a, la semaine dernière, rouvert des possibilités d'aides à l'investissement aux commerces du centre-ville. On est en train de travailler à l'intercommunalité, parce que l'ensemble des compétences économiques, à l'exception due commerce, est. Nous avons d'ailleurs décidé de transférer ce dernier bout de compétence commerce à l'intercommunalité dans une vision d'efficacité et de mutualisation complète des services.
Et puis on commence à déceler des vraies problématiques sociales, parce que ce covid va laisser des traces profondes dans la société. On est en train de perdre nos valeurs habituelles de relations. Il y a des problèmes de perspective de perte d'emploi, de difficultés alimentaires, sanitaires. On s'est aperçus que des patients restaient chez eux plutôt que d'aller voir le médecin.
On se prépare en 2021 à assumer toutes ces conséquences là.
Est-ce que vous pouvez faire un bilan des décisions politiques générales que vous avez mis en place ?
L'acte politique par essence, c'est le vote du budget. C'est une action essentielle où l'on commence à déterminer des visions d'action politique. On a commencé le budget 2020 qui a été voté par l'équipe précédente. On assume très républicainement les décisions prises sous l'ancien mandat mais depuis juillet nous travaillons à ce que va être notre projet politique défendu dans le cadre du budget 2021.
On sait qu'il y a beaucoup de sujets qui ont été évoqués à l'intercommunalité mais qui ont déjà fait l'objet d'échanges à la ville de Rumilly, parce qu'elle est directement concernée. Nous verrons ces sujets en janvier 2021. Je parle des six thématiques qui ont été évoquées et validées au conseil communautaire de la semaine dernière (14/12/20 ; ndlr). C'est d'abord l'intercommunalité parce que ce sont des projets de territoire puis les communes vont s'en saisir.
Le premier de ces grands projets, c'est l'aménagement de la base de loisirs et du plan d'eau. On va délimiter une zone d'étude extrêmement large. On a considéré que l'intercommunalité avait beaucoup investi sur ces sujets là donc que ça ne concernait pas que la ville. Aujourd'hui on se dit qu'on doit se projeter à 15 ou 20 ans pour savoir ce que va devenir cette zone. On voudrait qu'elle devienne un espace naturel sensible mais on a beaucoup de difficultés. On conduit depuis six mois des études très approfondies pour connaitre l'origine des pollutions du plan d'eau et comment s'en sortir. On sait que si on veut continuer à se baigner dans ce plan d'eau et avoir une cohabitions intelligente avec la pêche, il faudra apporter des solutions techniques très importantes. Dans ce large périmètre, on a la Chéran, on a la LPO et on aura sans doute quelques infrastructures qui viendront agrémenter la gestion du plan d'eau. On connaitra sans doute dans l'année 2021 quels seront les grands thèmes de l'aménagement du plan d'eau.
La deuxième thématique, c'est la piscine intercommunale. On connait tous la piscine actuelle de Rumilly, tout le monde en a profité sauf que cette structure est extrêmement vieillissante et même si on arrive à la maintenir, on peut imaginer qu'elle ne le sera pas au-delà de deux ou trois saisons. Donc soit on aura un projet de piscine intercommunale qui viendra prendre la relève avec toutes les qualités environnementales, écologiques etc., soit il faudra qu'on aille tous se baigner à Aix-les-Bains ou Annecy. Dans les six mois à venir il faut qu'on sache s'il y aura une piscine après 2023 sur la communauté de communes ou pas. J'ai mon avis dessus, ça fait plus de 15 ans que je défends le projet. Ce dont on est sûrs, c'est qu'une piscine réalisée à 100% de fonds publics, c'est inaccessible. Donc nous allons aller sans doute, si on décide d'en avoir une, vers une organisation avec des intervenants publics et privés. Nous avons des obligations de service public et il y a aussi une nécessité de financement et de rentabilité.
Pourtant le partenariat public privé a été particulièrement décrié au cours des 5-10 dernières années parce qu'il est beaucoup plus intéressant pour le privé que pour le public.
Le privé, quand il vient s'associer à une concession, il ne vient pas pour perdre de l'argent. Mais quand on a l'incapacité de réaliser une infrastructure en public, est-ce qu'il vaut mieux s'en passer ou essayer de trouver des solutions ?
Aujourd'hui, il y a des choses qui sont inacceptables pour des élus que nous sommes. C'est que les enfants de la communauté de communes prennent le bus pour aller apprendre à nager à Aix-les-Bains.
On arrive avec les structures locales à trouver quelques solutions mais à l'échelle de notre territoire, ça n'est plus admissible.
Le troisième point, c'est le transport, les déplacements et les mobilités. On n'habite pas dans un territoire comme le nôtre pour passer une heure sur la rocade. On a besoin de travailler sur ce sujet là.
Il faut qu'on réfléchisse à un schéma de déplacements et de mobilités qui entrent sur notre territoire et qui en sorte. Il faut qu'on s'associe aux gens qui ont compétence sur les routes, notamment le département, et on arrivera forcément à trouver une solution d'aménagement et il faudra qu'on revienne sur cette grande question de l'infrastructure qui pourrait franchir le Chéran.
On est en train de parler de la déviation Est ?
Voilà, on parle de ça depuis très longtemps donc là il faut qu'on y apporte une réponse.
Autant la piscine, lorsqu'on apporte une réponse dans les 3 ans, on apporte une réponse effective. Là lorsqu'on apporte une liaisions entre deux routes départementales, c'est dix ans. Donc entre ce moment et aujourd'hui, il faudra trouver des solutions. Ce qu'on sait, c'est qu'on ne pourra pas - même si on décide de cette infrastructure - continuer à vivre sans trouver de solutions intermédiaire. Ce projet sera lancé au mois de janvier.
Le quatrième sujet, c'est le CIAS (Centre Intercommunal d'Action Sociale). Rumilly a la force, la puissance centrale avec des services extrêmement compétents. L'idée n'est pas d'enlever des compétences politiques aux élus de terrain, c'est le maire et ses élus qui entrent dans les cuisines pour aller voir les sujets.
Mais on voudrait faire rayonner notre capacité de réponse pour avoir un outil puissant et réactif au service des élus où qu'ils soient, partout sur le territoire.
Le dernier point, c'est l'évaluation, dans chaque commune de l'action de la communauté de commune depuis sa création. On voudrait faire un arrêt sur image pour que les élus qualifient ses compétences et quelles sont celles qui pourraient apporter un soutien aux communes. On aura aussi un débat sur l'action de la communauté de communes dans les 10 à 15 ans à venir. On sait qu'elle n'est pas forcément bien perçue des habitants, qui ne savent pas forcément ce qu'il s'y passe.
C'est un vrai projet politique d'aménagement du territoire.
Est-ce qu'il y a d'autres points particuliers à aborder ?
On a quelques points qu'on a relevés qu'on veut voir affichés dans le budget 2021.
D'abord sur la transition écologique et l'impact environnemental. D'abord avoir 1M€ dans notre budget à destination de l'amélioration énergétique de nos bâtiments, chaudières, véhicules… C'est une enveloppe qu'on voudrait véritablement afficher. Ça va nous obliger d'avoir une analyse de nos bâtiments et à organiser nos interventions.
Il y a aussi le projet qu'on avait appelé «Nature en ville». C'est la réintégration de végétation à l'intérieur de la ville et en particulier du centre-ville. Ça passera sans doute par une aide extérieure de cabinet pour nous guider. Par exemple, le dossier Rue Montpelaz - Rue des Tours sera un bon exemple de revégétalisation. Il faut un traitement végétal à cette reconfiguration.
Et puis on a aussi des urgences qui se sont intégrées. On a notre vision et on a aussi la réalité du quotidien. On a un bâtiment industriel qui abrite aujourd'hui l'auto-modèle club et à notre arrivée on a demandé une expertise dans tous les domaines de ce bâtiment. On a été interpellées sur le caractère de risque majeur de continuer à utiliser ce bâtiment là. La structure est très fragilisée, les accès ne sont pas bons, on est dans une situation extrêmement dégradée de ce bâtiment. En 2021 on va mettre en place une action de protection des gens qui l'utilisent. Je pense que d'ici à la fin de l'année ou au premier semestre 2022, ce bâtiment sera déconstruit.
On aura aussi une action au regard du monde associatif. Très sincèrement, on ne sait pas dans quel état on va le retrouver après cet épisode. Il faudra qu'on fasse un bilan de l'ensemble des associations. Certaines ne seront que très modestement touchées mais on va faire en sorte qu'elles aient les moyens de redémarrer très rapidement leur activité. On a déjà repéré certaines associations qui vont avoir beaucoup de difficultés financières.
C'est donc un projet solidaire, durable, innovant. Lorsque le brouillard va se lever, on va mettre tout à plat et les collectivités devront être prêtes à l'assumer. Aujourd'hui on peut regarder dans les livres, on n'a pas d'autre expérience comme ce qu'on vit aujourd'hui. Peut être que dans quelques dizaines d'années on pourra revenir sur ce qu'on a vécu mais aujourd'hui on essaye de trouver des solutions au jour le jour.
Est-ce que vous allez continuer à soutenir les commerçants pour l'année 2021 ?
Oui. C'est l'une des premières décisions qu'on a prises au mois de juillet, et on va faire perdurer toutes ces aides particulières, et il faudra peut-être qu'on en invente pour les aider.
L'intercommunalité est en train de regarder d'autres dispositifs pour pouvoir les aider à se sortir de ce pas là.
Comment allez vous exprimer vos vœux ?
Nous avons, les semaines dernières, enregistré par vidéo des vœux. Il y a des interventions de l'ensemble des 33 conseillers municipaux. On peut ne pas être d'accord sur tout lors de notre travail quotidien mais il y a des moments où on oublie tout ça pour que tout le monde ait un temps de parole pour souhaiter que l'année 2021 soit bien meilleure que celle de 2020.
Est-ce que vous voulez adresser des vœux à nos lecteurs ?
Je sais que les lecteurs de l'Hebdo sont très attentifs et suivent la vie communale. C'est un moyen aussi pour nous élus de nous permettre de tenir informés et au courant les habitants du territoire. La presse locale et la presse écrite doit traverser les âges et c'est très important que nous puissions continuer d'avoir notre entrée et notre capacité à nous exprimer dans cet hebdo là. Donc évidement on leur souhaite une année 2021 qui sera plus riche humainement, économiquement et solidairement que 2020. On aimerait bien leur dire qu'au 1er janvier tout va changer mais malheureusement on est tous aujourd'hui convaincus que ça ne sera pas mais on voudrait aussi tous leur exprimer une fois de plus notre solidarité, entre soutien et on sera là à leurs côtés dans les moments que l'ont vit individuellement mais aussi collectivement.
Est-ce que vous allez vous faire vacciner ?
Oui. Parce que je suis un de ceux qui est passé par la maladie au mois de mars, après le premier tour des élections municipales. Je sais ce que c'est que le covid, non pas dans sa forme très grave, dans sa forme moyenne. Même dans la forme moyenne, je peux vous dire que le premier vaccin à Rumilly, c'est sans doute moi qui vais sauter dessus pour me faire vacciner. Je ne voudrais jamais revivre ce moment qui m'a été très difficile. Donc oui, s'il faut un volontaire pour le premier vaccin, ça sera moi.
Je peux comprendre aussi d'autres personnes qui ont une autre posture.
Propos recueillis par M. H-B
le 22/12/2020